« Confession
d’un Cardinal » Réfutation :
« S’il y avait danger pour la foi,
les supérieurs devraient être repris par les inférieurs,
même en public. Aussi Paul, qui était soumis à Pierre,
l’a-t-il repris pour cette raison » (St Thomas d’Aquin
Somme théologique II II 33, a. 4).
J'ai
cru c'est pourquoi j'ai parlé (2
Corinthiens: 4.13)
Apologie
de l’Église Catholique
« Que personne ne vous abuse par de
vains discours » (Éphésiens 5,6)
Le 26 mars 2011 j’assistai à
une conférence sur le livre « Confession d’un Cardinal »
donnée par l’auteur à quatre mains du livre éponyme, Olivier
Legendre (Éditions JC Lattès 2008). La conférence eut lieu à
l’abbaye Bénédictine de Belloc à proximité de Bayonne.
Le livre qui fut écrit de par la
volonté du Cardinal X1
est la transcription des confidences, des réflexions, des anecdotes
et de la vision doctrinale de celui-ci sur l’Église catholique,
son histoire, son affaissement actuel et sa voie telle que le prélat
l’entend pour le futur.
La lecture du livre m’ayant
inspiré un profond malaise en raison des partis pris et des analyses
injustes et réductrices sur l’histoire et la nature de l’Église,
ce qui ne pouvait conduire qu’à des développements et des
projections inexacts et même dangereux, je décidai d’intervenir
durant le débat habituel de fin de conférence.
J’avais bien sûr l’intention
de présenter mes objections, mes critiques afin que soit exposée
une doctrine plus fidèle et plus respectueuse envers la Sainte
Église catholique.
Très rapidement mon intervention,
très courtoisement acceptée par Olivier Legendre, irrita le frère
bénédictin qui organisait l’assemblée (j’avais remarqué sa
mimique contrariée pendant mon intervention). Si bien qu’après
quelques brèves minutes où je ne pus que commencer ma démonstration
il me fit rendre le micro sous prétexte qu’on ne posait que des
questions. Mes objections furent donc écourtées, sans urbanité,
fermement, néanmoins sans incident. Bien entendu la majorité de
l’assemblée m’était hostile car je troublais le consensus
habituel autour du conférencier installé à sa chaire. L’Église
du « dialogue », Oui, tant que sont échangées
des opinions ; mais NON, quand est témoignée
l’orthodoxie. Car alors nous entrons dans l’Église du
silence.
Ce dénouement est sans doute un
signe de la Providence car, alors que je n’y aurais jamais songé,
j’ai résolu d’écrire ma réfutation, reprenant pour les
développer les arguments que je me proposais de présenter.
Qu’il en soit fait selon ce que
Dieu voudra.
La
crise de l’Église :
Le propos du Cardinal X est de
constater la crise de l’Église, d’en déterminer les causes par
l’Histoire, d’en privilégier une comme déterminante
et de proposer une nouvelle voie de présence au monde, nullement
nouvelle d’ailleurs nous le verrons2,
mais surtout inadaptée, et pire. Car rien n’est pire que de douter
de l’Église comme moyen de sanctification évangélique car c’est
aussi douter de Jésus Christ qui ne fait qu’un avec elle.
Sur les manifestations de la crise
il n’est pas nécessaire d’insister : crise des vocations,
disparition de pans entiers des ordres religieux, effondrements des
baptêmes, des mariages, des pratiques sacramentelles, de
l’assistance à la messe, au catéchisme…L’analyse factuelle
est cruelle mais nul ne la conteste.
Pour le Cardinal, la cause
première et essentielle de cette crise réside dans l’histoire
dévoyée de l’Église au cours des temps, depuis Constantin
jusqu’à la perte des États pontificaux en 1870. Jusque là, Rome,
en connivence avec les pouvoirs politiques, aurait sacrifié
son message au maintien de sa puissance temporelle. Disons le tout
de suite, c’est l’analyse archi ressassée des Francs maçons et
anticléricaux depuis deux siècles, des modernistes, des marxistes,
de tous les ennemis de l’Église qui caricaturent pour ruiner. Nous
verrons ce qu’en penser.
L’histoire
de l’Église, selon le Cardinal X :
« Nul
ne peur avoir Dieu pour Père s’il n’a l’Église pour Mère »
Saint Justin (†162/168 ?)
C’est à partir d’ici que
commence la flagellation inique, déloyale et anachronique3
le l’Église par le narrateur, dans un survol de l’histoire
ecclésiastique purement sociologique, humain et historiciste4
qui ne fait jamais allusion
et donc ne recours jamais à
la nature divine de
l’Église fondée par Jésus Christ et animée par le Saint Esprit.
Comme si TOUT ce qui
était survenu au catholicisme depuis toujours n’était pas disposé
par Dieu lui-même qui lui en fit la promesse d’indéfectibilité
(« et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle »
(St Matthieu 16 :18 ) et d’assistance « Et moi,
je suis avec vous toujours jusqu'à la fin du monde.»(St
Matthieu 28 :20). Si nous croyons avec confiance que Dieu
choisit ou permet les évènements qui guident son Église, même les
chutes morales et les accidents de l’histoire en vue du succès,
non humain mais surnaturel de sa mission, nous ne pouvons plus
regarder sa marche dans les siècles comme un sceptique désenchanté
et réprobateur.
Au contraire, l’histoire sans
surnaturel de l’Église s’écrit à travers un prisme mutilateur,
simplificateur, unilatéral, une parodie d’histoire. Avec de
surcroît quelques inexactitudes factuelles que j’ai du mal à
croire accidentelles, provenant d’un Cardinal manifestement cultivé
mais plus voltairien que thomiste.
L’Église,
le Moyen Âge & les femmes :
- ainsi l’Église aurait partagé avec « les puissances temporelles » des « solidarités » parmi lesquelles « les femmes n’ont ni âme ni existence civile » (page 91). Fable anticléricale rabâchée et absurde, inconvenante surtout sur les lèvres d’un Cardinal qui ne peut ignorer le culte immémorial, fervent et universel de la Très Sainte Vierge Marie qualifiée de « Mère de Dieu » dès le concile d’Éphèse en 431 ; ne reconnaissait on alors pas qu’elle eût une âme ? et la très antique prière du canon romain5 « Nobis quoque peccatoribus » ne recourt elle pas à l’intercession des saintes Félicité, Perpétue, Agathe, Lucie, Agnès, Anastasie ? Ces saintes étaient donc au paradis, sans âme ? Qui peut croire qu’un culte était rendu à des êtres dépourvus d’âme ? L’Église n’a-t-elle pas canonisé Ste Catherine de Sienne († 1380) qui sermonna Grégoire XI, le Pape ! pour qu’il rentre enfin d’Avignon à Rome ; ce qu’il fit, obéissant en plein Moyen Âge à une femme (sans âme ?). L’abbaye, immense, de Fontevraud (fondée en 1101) avec des hommes et des femmes dans des bâtiments séparés vivant sous la règle d’inspiration bénédictine n’était elle pas dirigée exclusivement par une abbesse selon la règle du fondateur Robert d’Arbrissel ? une abbesse sans âme ?
Pas une
seule épître
de Saint Paul,
où le salut final cite nommément des frères, qui n’exalte aussi,
souvent, la mission de
femmes dans les
premières communautés : « Phébé la
diaconesse »
première citée
au final de la grande épître aux Romains « Recevez
la d’une manière digne des saints. Assistez-la en toute affaire.
Elle est venue elle-même en aide à beaucoup de gens et à
moi-même »
puis « Marie
qui s’est donnée beaucoup de mal pour vous »
« la très
chère Persis »
« la mère
de Rufus qui
est aussi la mienne »
(elle fut
probablement l’épouse de Simon de Cyrène dont St Marc désigne
les deux fils « Rufus & Alexandre » Mc 15,21)
« Julie » ;
« Priscille »
(1 Corinthiens).
Aliénor d’Aquitaine,
chef d’état à part entière, diplomate remarquable ne marqua-t-
elle pas son siècle (1122-†1204), Blanche de Castille ne
fut elle pas régente de France au XIII° siècle, et Isabelle la
catholique Reine de Castille, puis d’Espagne au XV° ? Ste
Jeanne d’Arc ne se vit elle pas confier une armée par le
Roi en 1429 ? Et Jeanne Hachette en 1472 ne sauva t elle
pas la France de l’invasion du Téméraire ? D’innombrables
femmes au moyen-âge étaient médecin, apothicaires (voir les
romans de Paul Doherty professeur d’histoire médiévale en
Angleterre et sa saga en 7 tomes « contes de Cantorbéry de
Katherine Swinbrooke » très documentée sur les mœurs et les
coutumes d’alors).
Connivences
temporelles ?
- Autre inexactitude récurrente dans l’examen historique du Cardinal : l’Église aurait cheminé tout au long avec les puissances temporelles, César puis les monarques avec une complicité coupable qui liait les deux pouvoirs. Image conventionnelle construite et forcée afin d’enterrer notre religion à la suite des trônes des rois. C’est l’histoire fabriquée pour nuire qu’endosse le prélat.
Certes il fallut cohabiter
pendant des siècles avec les régimes contemporains de 2000 ans.
Notons au passage, ce n’est pas insignifiant, que durant cette ère
de vie commune les régimes passèrent, se succédèrent, sombrèrent,
se contredirent dans leur expression politique (Empire romain,
féodalité, monarchies, républiques, dictatures, Re empires,
républiques parlementaires, présidentielles…), l’Église
subsiste, non sans changer, mais substantiellement immuable
dans son organisation hiérarchique, dans sa doctrine, dans son
sacerdoce, dans ses sacrements. Il a donc été normal, coexistant
avec le pouvoir temporel, d’entretenir des rapports constants avec
lui : coexistence n’est pas compromission ; après tout
l’Église fut toujours dans les états. Mais fut elle
toujours et par principe avec les états6 ?
Quelle méconnaissance de l’histoire de le prétendre et d’en
tirer la cause de l’affaiblissement religieux actuel !
Dès l’empire romain converti,
trop de Césars furent tentés de s’approprier le pouvoir religieux
et nos papes durent lutter âprement, héroïquement pour maintenir
la sphère religieuse hors du champ impérial. Le Césaropapisme des
empereurs, fléau de l’antiquité chrétienne, s’exerça dès la
crise arienne, puis nestorienne, puis iconoclaste et bien d’autres
encore, les empereurs tentant d’imposer telle hérésie ou tel
courtisan à un poste ecclésiastique à des papes dépourvus de
moyens mais non de courage. Afin de ne pas surcharger ce texte
d’exemples qui fourmillent7
on citera simplement l’excommunication de l’Empereur Anastase 1°
par le pape Symmaque († 514) pour hérésie monophysite8.
De fait, contrairement à la fausse opinion dénuée de fondement
historique réel la conversion de Constantin, si elle fit cesser le
martyre sanglant de masse, n’abolit pas la confrontation, ni la
persécution9 ;
le prétendu constantinisme10
de l’église est une invention intentionnelle pour la déconsidérer
au mépris des faits.
Identiquement durant les temps
jusqu’à la chute des monarchies, nulle connivence radicale mais
une confrontation permanente. Qui ignore la longue lutte du Sacerdoce
et de l’Empire qui se conclut, provisoirement, par l’humiliation
de l’Empereur Henri à Canossa devant St Grégoire VII (1077).
A-t-on oublié l’excommunication de Philippe Auguste, l’assassinat
de l’archevêque de Cantorbéry Thomas Becket(1170) par le roi
Henri II d’Angleterre, l’attentat d’Agnani provoqué par
Philippe le Bel contre le Pape qui en mourut (8 septembre 1303), les
interdits de Philippe II d’Espagne (toujours cité comme le type du
roi catholique !) contre les brefs de Saint Pie V, la lutte de
Louis XIV contre le Pape dans l’affaire de la Régale (où le roi
procédait à une spoliation des évêchés et les maintenait
délibérément vacants) puis la Déclaration des Quatre Articles
gallicans et conciliaristes répondant aux intentions royales contre
le Pape en 168211,
le sac de Rome par l’Empereur (catholique) Charles Quint (mai
1527,20 000 victimes, des dommages incalculables dans la ville), le
conflit de Pie VI avec l’empereur Joseph II d’Autriche qui
prétendait régenter TOUTE la religion jusqu’au détail, les
persécutions révolutionnaires qui virent Pie VI prisonnier, exilé
dans des conditions lamentables, mort épuisé à Valence en France
où il fut enterré à 82 ans, sans cérémonie religieuse dans une
fosse commune.
Et pour conclure sur les
« connivences avec les puissances » que dire de Napoléon
prédateur du Saint Siège, geôlier du Pape Pie VII et qui alla
jusqu’à lever la main sur lui à Fontainebleau12.
Non, la vie de l’Église au
cours des temps ne fut pas un long fleuve tranquille et dompté bordé
de fleurs.
Galilée13 :
Le Cardinal X attribue une grande
influence à la décision de l’Église de condamner Galilée
en 1633 ; il y voit une preuve de rupture grave avec l’esprit
scientifique moderne l’amenant à justifier le divorce du
monde moderne avec l’Église (elle s’est trompée sur ce sujet,
donc elle se trompera encore, et elle discrédite ainsi son autorité
qui a perdu le sacré). Bien que de nombreux historiens aient remis
les choses à l’endroit sur ce sujet et restitué la vérité il
sera utile de solder aussi ce réquisitoire récurrent contre
l’Église :
« La gloire de Galilée
repose surtout sur des
découvertes qu’il n’a jamais faites et sur des exploits qu’il
n’a jamais accomplis.
Contrairement aux affirmations de nombreux manuels, même récents,
d’histoire des sciences, Galilée n’a pas inventé le télescope.
Ni le microscope. Ni le thermomètre. Ni l’horloge à balancier. Il
n’a pas découvert la loi d’inertie ; ni les taches du soleil. Il
n’a apporté aucune contribution à l’astronomie théorique. Il
n’a pas laissé tomber de poids du haut de la tour de Pise ; et
il n’a pas démontré la vérité du système de Copernic.
Il n’a pas été torturé par l’Inquisition ni excommunié, il
n’a pas dit « Eppur si muove » (et pourtant elle tourne) ; il n’a
pas été un martyr de la science.
» Arthur Koestler (Les
somnambules,
196314) ;
Koestler qui était Juif et non catholique, communiste puis anti
communiste, esprit libre et errant ne peut être soupçonné, en
l’occurrence, de parti pris.
On nous présente habituellement
Galilée comme un génial héros de la science, persécuté par
l’obscurantisme (l’Église) mais, en vérité, la correspondance
et les ouvrages de Galilée témoignent objectivement d’un esprit
frondeur et orgueilleux, souvent éloigné du véritable esprit
scientifique.
Galilée s’attribua la
découverte des taches solaires. Or ces taches avaient été
observées à l’œil nu dès le IVe siècle av. J.-C., et à
la lunette par Scheiner en 1611, soit deux ans avant Galilée. Au
père Grassi qui s’insurgeait contre cette falsification, il
n’hésita pas à écrire : « Vous n’y pouvez rien, Monsieur
Grassi, il a été donné à moi seul de découvrir tous les
nouveaux phénomènes du ciel et rien aux autres. Telle est la
vérité que ni la malice ni l’envie ne peuvent étouffer » (Il
Saggiatore). D’ailleurs avec le Dialogue (1632), il
régla définitivement leur compte à ses adversaires : « ceux-ci
sont des pygmées mentaux », des « idiots stupides », « à peine
dignes du nom d’êtres humains » !
Il construisit une théorie des
marées complètement erronée, le pape Urbain VIII, qui estimait
Galilée, ne souhaite pas qu’il fasse figurer dans son livre des
arguments aussi peu convaincants. L’entêté Galilée ne tiendra
pas compte de cet avis.
Le théologien et évêque
Caramuel, s’interrogeant sur la conduite à suivre si une preuve
était fournie en faveur du mouvement de la terre, s’exprime ainsi
en 1651 : « Si cela se produit, les cardinaux permettront simplement
d’expliquer les paroles du chapitre X de Josué comme des
expressions métaphoriques. » (Épisode de l’arrêt de la course
du soleil).
Tous les témoignages des
théologiens de l’époque montrent bien que les décrets de
condamnation de 1616 et 1633 furent bien pris comme des décrets
disciplinaires. En publiant un décret disciplinaire, le Saint-Office
n’a donc pas clos la question, mais a montré qu’il ne pouvait
pas cautionner la témérité d’un homme qui voulait imposer
une simple hypothèse scientifique, et réinterpréter
l’Écriture Sainte en fonction de cette hypothèse.
Quant aux prétendues persécutions
dont aurait pâti Galilée, en voici le récit : Dès son
arrivée à Rome pour le procès, Galilée bénéficie de conditions
matérielles confortables et demeure chez son ami Niccolini à
l’ambassade de Toscane, alors qu’il aurait dû séjourner dans
une prison du Saint-Office comme tout accusé. Il est autorisé à
faire réciter les psaumes de la pénitence par sa fille,
religieuse carmélite. Il n’ira jamais en prison, car Urbain
VIII lui permet de retourner dans le palais de Niccolini, puis à
Sienne dans celui de l’archevêque Piccolimini, autre ami dévoué.
A la fin de 1633, Galilée obtient la permission de se retirer dans
sa villa d’Arcetri, près de Florence. Il y passe les dernières
années de sa vie, très entouré, recevant ses disciples et ses
amis, et continuant ses travaux de mathématiques jusqu’à sa mort
en 1642.
La condamnation du livre de
Galilée Dialogue et des ouvrages enseignant le système de
Copernic a été levée en 1757, après plus de 100 ans
d’interdiction. Mais les décrets n’empêchaient pas de continuer
les observations du ciel et chercher des preuves solides en faveur du
mouvement de la terre. Les travaux en astronomie n’en ont pas été
enrayés pour autant : preuve en est le nombre d’ouvrages publiés
après 1633 par les plus illustres astronomes : Leibniz, Halley,
Newton… Loin d’être néfastes, les décrets contre Galilée
obligèrent les savants à appuyer leurs théories sur de
meilleures observations ou vérifications. Paradoxalement, la
science devait y gagner.
Finalement, la querelle à
laquelle Galilée prit part ne doit nous apparaître ni plus ni moins
qu’une simple étape dans l’édification de l’astronomie
moderne. L’Église y est intervenue contrainte et forcée, dès
lors que le débat avait dévié vers l’exégèse, ce qui la
concernait en propre. Elle a même rendu service à la science de
son temps en calmant les esprits et en rappelant à un savant la
véritable attitude scientifique : ne parler que par hypothèse si
la théorie n’est pas suffisamment prouvée par l’expérience.
Cependant le caractère ombrageux et emporté de Galilée l’avait
amené à l’excès vers des propositions, en partie vraies mais
témérairement catégoriques, bien que sans preuves, et à étendre
celles-ci au domaine de l’exégèse biblique qui dépassait sa
compétence et la légitimité de sa démarche.
Le
bienheureux PIE IX :
- Mais c’est à mon sens dans la narration purement naturaliste et politique de l’histoire des conclaves récents ou de la proclamation de l’infaillibilité du Pape par la Constitution « Pastor Æternus »(1870) que se manifeste la totale carence de perspective de la grâce dans la vie de l’Église de la part du Cardinal X. Dans ces deux évènements narratifs n’entrent en scène que des circonstances humaines contingentes, des rapports de force de type parlementaire ou géopolitiques. Nous lisons ici des récits sans spiritualité, strictement humains, dépourvus du respect et de la piété qu’un catholique devrait avoir pour ces évènements jalons de la vie ecclésiale. Le conclave n’est qu’une assemblée de sénateurs âgés qui votent selon des critères géographiques, sentimentaux, sous influences d’écoles diverses ou de mimétisme momentané et obéissants à un jeu parlementaire banal. Nulle trace de l’action du Saint Esprit qui est pourtant toujours l’auteur d’une « création nouvelle ». D’ailleurs qui est ce Divin Acteur pour lequel le Cardinal écrit « Nous autres catholiques, nous pensons que ce que nous appelons l’Esprit Saint est au travail au sein de notre Église » (page 113). Quelle manière de parler de la Troisième Personne de l’Auguste Trinité de façon irrévérencieuse, « ce que nous appelons », car il ne dit pas « Celui que nous appelons » qui fait référence à une personne mais « ce » qui qualifie un indéterminé. C’est que le Saint Esprit est en effet bien absent de l’Église qui comparait sous la critique du prélat.
La proclamation de
l’infaillibilité de son côté n’est pour lui que le cadeau
compensatoire des pères conciliaires fait à l’irritable père
fouettard Pie IX (le Bienheureux Pie IX !) afin de le dédommager
de la perte des états pontificaux (page 235) ; en somme le
cadeau inverse de Judas ! Celui ci avait obtenu 30 deniers pour
perdre l’auteur de la Grâce, celui là obtient la Grâce de la
vérité pour compenser la perte de trente deniers !
Quelle méconnaissance ou quel
refus de considérer l’enchainement VRAI des évènements du
concile Vatican I qui anéantit le prétendu troc sans dignité
d’un pouvoir temporel contre un pouvoir spirituel15
. Car Bhx Pie IX évoqua la convocation du concile le 6 décembre
1864, proclama en public son intention le 28 juin 1867 et le convoqua
le 28 juin 1868. Les États Pontificaux, excepté Rome étaient
perdus depuis le 18 septembre 1860, annexés par le Piémont du Roi
anticlérical Victor Emmanuel et du premier ministre Franc maçon
Cavour.
Or, Dans la bulle de convocation16
du concile Æterni Patris le programme fixé par Pie IX à
celui-ci est : défense de la foi contre les erreurs du
temps, mise à jour des canons du concile de Trente. RIEN
sur l’infaillibilité !
C’est à l’initiative de
plus de 400 évêques (sur ± 700 présents au concile à ce moment
là) qu’en janvier 1870 une pétition demande la mise à
l’ordre du jour de la question de l’infaillibilité. 136 évêques
signent une pétition en sens contraire.
Les débats théologiques durèrent
jusqu’au 18 juillet 1870 où le vote eut lieu ; 55
membres de la minorité (et non 140 comme
le dit le Cardinal !17)
préférèrent quitter le concile plutôt que de voter contre la
Constitution, 535 Pères votèrent OUI et 2 NON18.
Dès que le Pape eût ratifié la Constitution les 2 opposants et
ceux qui s’étaient abstenus (les 55 qui avaient quitté l’aula)
se rallièrent au texte19.
Rome fut envahie par le Piémont
le 20 septembre 1870 ce qui mit fin au Concile. Il n’y eut donc
AUCUNE intention ni de la part du Pape ni de celle des évêques
d’échanger un pouvoir contre un autre, rien dans les débats ni
dans les préparatifs du concile ne présente cette hypothèse
mercantile qui ravale une décision doctrinale au niveau d’un
marché sordide et vénal. Que n’entendrait on pas si on prêtait
au concile Vatican II des coulisses d’aussi bas étage ! Car
l’alternative est : le Saint Esprit assiste le concile ou ne
l’assiste pas. Mais le Saint Esprit est un grand absent des
confessions cardinalices. D’ailleurs, ce qui dément
péremptoirement la thèse du Cardinal X c’est que Pie IX qui régna
encore huit ans après la définition de l’infaillibilité
ne l’utilisa jamais ! C’est donc une conception et la
peinture d’une Église étriquée, méprisable & purement
humaine que nous livre le Cardinal X.
Selon lui le Pape Pie IX aurait
transposé « son enfermement physique » dans
son « attitude psychologique » (page 235) ;
manifeste erreur (?) chronologique du cardinal puisque
« l’enfermement » dans Rome se fit fin septembre
1870, alors que les grandes décisions doctrinales du Pape étaient
très largement antérieures : 1854 proclamation de
l’Immaculée Conception, 1864 encyclique Quanta Cura et Syllabus
des erreurs condamnées (entre autres libéralisme, matérialisme,
rationalisme, positivisme, relativisme qui déferlent alors
sur l’Europe et annoncent les cataclysmes européens du XX° siècle
car les idées fausses se muent facilement en pratiques inhumaines ).
C’est aussi omettre de dire que
Pie IX fut élu car Libéral (on sortait du règne de Grégoire XVI
qui avait condamné la liberté de conscience telle que définie par
Lamennais20, « un
délire », dans l’encyclique Mirari vos 183221).
Sitôt élu il décréta une amnistie générale, publie une
constitution à deux chambres, institue la liberté de la presse
(inexistante dans les états européens), crée un conseil
consultatif des désirs du peuple, la Consulta, fait
construire des chemins de fer et réseaux télégraphiques et
restaure l’éclairage public. Tout l’inverse de l’image
chagrine et recroquevillée sur le passé donnée par la Cardinal X.
L’assassinat par les révolutionnaires italiens ennemis de l’Église
du chef de gouvernement pontifical Pellegrino Rossi et l’insurrection
à Rome où est proclamée la République romaine obligent le
Pape libéral à fuir. Il reviendra à Rome en avril 1850 avec
les yeux ouverts sur la nature des idées révolutionnaires : il
en sortira une monumentale œuvre doctrinale. Si l’on a quelque
lumières de foi sur la vie de l’Église on ne pourra s’empêcher
de reconnaître que son pontificat de 31 ans, le plus long de
l’histoire, ne peut pas RIEN DEVOIR à la volonté ou la
permission de Dieu sur son Église ; car tout expliquer
de Pie IX et de Vatican I par des circonstances seulement humaines,
viles de surcroît, consiste à rester aveugle et sourd devant la
Providence qui conduit et assiste l’Église dans les siècles.
Les
États Pontificaux, pourquoi ?
Je le dis ici hardiment, le
Cardinal n’a rien compris ou rien voulu comprendre à la raison
d’être des États Pontificaux durant 11 siècles. ONZE Siècles
pendant lesquels le Saint Esprit âme de l’Église et Jésus Christ
sa Tête laissèrent délibérément errer leur Épouse !
L’Empire romain éteint, le
monde européen entre dans le chaos politique et social de la
féodalité faute d’État central unificateur. Dans un
régime féodal au pouvoir éclaté, anarchique, violent et
encore barbare, la seule garantie contre les prédateurs
environnants et d’indépendance de ses décisions est la possession
d’un territoire protégé. Le Patrimoine c’est la liberté. Le
Pontife romain fut libre – et encore, relativement- parce que son
État le préservait des tentations féodales puis royales d’usurper
son pouvoir spirituel.
Si Dieu permit en 1870 la perte du
pouvoir temporel, humiliation crucifiante pour les catholiques
d’alors et pour le Pape lui-même, c’est sans doute d’abord
afin d’éprouver le Siège Apostolique : « Ne soyez plus
dans cette erreur que les choses pénibles à la nature ne sont que
des châtiments de Dieu. Elles sont nécessaires aux gens de bien,
pour augmenter leurs mérites et les faire croître en vertu »
(« Méditations ascétiques » du Père de Dreux OFM).
Mais aussi Dieu savait mieux que les hommes d’alors vers quel monde
nous allions à la fin du XIX° siècle, un monde de fer où deux
guerres mondiales et des idéologies totalitaires implacables aux
âmes seraient fatales à de puissantes nations, produiraient près
de 200 millions de morts et déplacerait les centres de pouvoir vers
d’autres horizons.
Désormais, dans un univers où la
nation, l’aire géographique ou l’État ne sont plus protecteurs,
l’État Pontifical n’a plus de raison d’être ; le pouvoir
spirituel suffit, Dieu aidant.
Dieu le savait, Il écrit droit
avec des lignes courbes. Transcendant l’Histoire il anticipe les
besoins du futur pour son Église. Celui qui lit l’histoire
du catholicisme en ne considérant qu’un seul versant,
sociologique, coiffé de lunettes déformantes et retranchant
l’éclairage surnaturel mutilera inévitablement –et défigurera-
cette histoire. On n’aura plus alors qu’une pauvre histoire
humaine qui n’expliquera jamais comment avec tant de défauts et
ses travers indéniables l’institution dure depuis 2000 ans,
intacte substantiellement et inchangée. Durant l’âpre négociation
du concordat, Napoléon excédé par la résistance du cardinal
Consalvi que Pie VII avait envoyé à cet effet, le menaça ainsi :
« Votre Église, je la détruirai et j’en bâtirai une
autre ». Le courageux Secrétaire d’État du Saint Siège lui
répondit : « Sire ce que de mauvais prêtres, de
mauvais évêques, de mauvais cardinaux et de mauvais Papes n’ont
pu faire tout au long des âges, vous ne le réussirez pas non
plus ! »22
Oui, l’Église est Sainte avec
des membres pécheurs ; bien sûr on peut ne voir que les
pécheurs mais on ne voit pas ainsi qui est l’Église et de
la sorte on perd l’Espérance et avec elle l’intelligence des
faits.
Les
bienfaits catholiques :
Car pas une
seule fois dans son survol de l’histoire
ecclésiastique le Cardinal X n’évoque les bienfaits
spirituels et sociaux de l’Église
durant les siècles. Dans sa braderie iconoclaste il oubli l’immense
rôle qu’elle joua pour subvenir à la lacune de TOUS les états
européens : elle créa et géra les hôpitaux (les lazarets)
les écoles, les Universités (la plus prestigieuse : la
Sorbonne), les refuges et soupes pour indigents ; elle institua
et fit respecter les Trêves de Dieu pour limiter les guerres,
civiles et autres, elle créa des asiles pour enfants abandonnés,
elle imposa le repos hebdomadaire du dimanche (que la république est
en train de supprimer), le repos des fêtes chômées, elle inventa
le droit d’Asile, elle sauva et transmis le savoir grec et latin
par les monastères, elle fut un foyer rayonnant d’art pictural,
musical, poétique, de sculpture, d’architecture. L’Église fut
la première à
condamner l’esclavage (Bulle Sublimis
Deus de
Paul III, du 29 mai 1537, qui interdit l'esclavage des Indiens
d'Amérique, 17 ans après la conquête du Mexique !),
à protéger les Juifs persécutés (on disait alors « heureux
comme un juif à Rome »). Elle fonda des ordres religieux pour
adoucir les conditions des prisonniers, des galériens, pour racheter
les esclaves capturés par les barbaresques en Afrique du Nord
(des dizaines de millier). Elle créa des
ordres religieux mendiants car elle est riche de ses pauvres, des
ordres prêcheurs pour évangéliser les faibles, les hérétiques,
les puissants, toujours frivoles et incrédules, des ordres
contemplatifs priant pour ceux qui ne prient pas et rachetant le
monde par leur ascèse perpétuelle. Elle se réforma elle-même par
des papes et des conciles conscients des besoins des temps.
Des livres entiers furent écrits
pour expliquer cela mais notre cardinal n’en dit mot. Pourquoi la
face lumineuse de notre Église est elle ainsi occultée, oubliée,
ensevelie, parfois flétrie ? Par un Cardinal !
C’est que cette Histoire dont il
fait la cause de la crise des temps présents pour notre Église
EXIGE d’être bien sinistre, bien imparfaite et bien stérile pour
expliquer ses choix et options d’une autre Église
qui humanise et soit invisible
pour retrouver l’Évangile. Nous avons ainsi
défini vers quelle alternative nous dirige le prélat qui, on le
verra, n’est ni originale, ni nouvelle, ni féconde, ni hélas très
catholique. C’est parce que son analyse de l’histoire commande
toute sa démarche que j’ai pris soin de contrebattre
méticuleusement sa présentation captieuse des faits.
Les
« solutions » du Cardinal X.
« Luther
et les siens ont désespéré de l'Eglise, et qui désespère de
l'Eglise, c'est curieux, risque tôt ou tard de désespérer de
l'homme…
on
ne réforme l'Eglise visible qu'en souffrant pour l'Eglise invisible.
On ne réforme les vices de l'Eglise qu'en prodiguant l'exemple de
ses vertus les plus héroïques…
L'Eglise
n'a pas besoin de réformateurs, mais de saints. »
Bernanos
(dans son texte « Frère Martin »)
« Les
hommes doivent être changés par la religion et non la religion par
les hommes. » Gilles de Viterbe, général des Augustins
discours d’ouverture du concile de Latran 3 mai 1512.
Parvenus
au terme de la copieuse première partie historique des « Confessions
d’un Cardinal » nous entrons par le détour du récit du
génocide Rwandais dans le dessein subtil du narrateur qui conduit
son lecteur avec habileté vers le but qu’il s’est fixé et vers
lequel il chemine avec la séduction d’un brillant esprit :
nous convaincre de changer l’Église. Le signataire du
livre, Olivier Legendre, qui partage manifestement les intentions du
cardinal, l’accompagne avec connivence et compétence dans le
dévoilement de sa pensée, l’obligeant parfois à la préciser et
à aller au terme de ses conséquences. C’est son rôle de
révélateur (au sens photographique) et il le remplit avec d’autant
plus d’aptitude que le cardinal a bien reconnu en lui l’écho de
ses idées.
Leçons
du Rwanda :
Comment
un pays africain aussi christianisé, avec une Église
catholique bien structurée, une hiérarchie solide, des statistiques
religieuses flatteuses (baptêmes, catéchismes, pratique religieuse,
mariages religieux, tous ces indices abondants et ancrés) a-t-il pu
soudain, instantanément, sombrer dans la pure barbarie intégrale,
oublieux de sa marque chrétienne au point de se ruer dans
l’assassinat de masse sanglant et bestial de ses propres
compatriotes et voisins ? (le meurtre de masse fut accompli à
la machette! un million de morts en environ trois mois).
La
question du Cardinal est légitime, elle est fondée, elle nous
interpelle, elle nous scandalise, elle appelle forcément une
réflexion et si possible, une réponse.
Le
récit du Cardinal est émouvant et même poignant, sa sœur,
religieuse au Rwanda lui a fait ressentir en lui-même ces évènements
dramatiques et insupportables, révoltants.
Bien
sûr sa réponse à ce qui est un scandale est une réponse possible.
Elle est même spontanément naturelle : l’Église là-bas a
été incapable de transformer assez les hommes en
chrétiens afin de rendre impossible l’inconcevable retour à
la férocité bestiale. Donc l’Église, qui a failli, doit être
changée avec son message : elle doit désormais « HUMANISER
LE MONDE QUI NOUS ENTOURE », « créer un peu d’HUMANITÉ
autour de nous » (page 205).
Je
crains que la légitime émotion rwandaise ait égaré la clé de
l’histoire de l’homme et de l’humanité dans l’esprit du
Cardinal. Cette clé, sans laquelle RIEN de l’histoire de l’homme
et de ses souffrances et de ses péchés ne se comprend, c’est le
péché originel23.
Certes le baptême le guérit, mais non sa cicatrice et ses
effets sur notre nature. Pour réprimer les conséquences de ce
péché il y faut le recours constants aux trésors de grâce
dispensée par l’Église seule. Ainsi l’a voulu Dieu.
Car
la concupiscence qui est la conséquence du péché d’Adam nous est
transmise avec son cortège de passions qu’énumère St Paul dans
l’Épître aux Galates (5 :19 à 21) : « Or
on sait bien tout ce que produit la chair : fornication, impureté,
débauche, idolâtrie, magie, haines,
discorde, jalousie, emportements, disputes,
dissensions, scissions,
sentiments d'envie, orgies, ripailles et choses semblables - et je
vous préviens, comme je l'ai déjà fait, que ceux qui commettent
ces fautes-là n'hériteront pas du Royaume de Dieu. »
Ce
n’est donc pas en humanisant le monde qu’on le libèrera
de ses affreux démons intérieurs, de ses pulsions meurtrières et
suicidaires, de ses sauvageries collectives et démentes qui
abolissent la raison et enfouissent la foi, c’est en le
divinisant, en le sanctifiant par la conversion soutenus par la
grâce des sacrements et la pratique assidue, persévérante et
enracinée des vertus chrétiennes, conversion toujours à
reprendre, à soutenir, à renouveler.
Le
Père qui a créé les hommes a dû nous envoyer le Fils pour
faire les chrétiens et le Fils nous a envoyé le Saint Esprit
qui fait les saints. Humaniser le monde c’est
remonter l’histoire et effacer les bienfaits de notre religion,
insuffisants parfois on le sait bien, mais sans lesquels l’humanité
régresserait à l’inhumain ; car « là où il y a homme
il y a hommerie » (Montaigne). C’est plus de Jésus Christ,
plus de Saint Esprit, donc plus d’Église qui en est le Corps
mystique qu’il faut à l’humanité. Or le Cardinal nous propose
l’inverse, fausse solution à un vrai drame, il nous entraine vers
la fusion de l’Église dans le monde, sa disparition par
imprégnation aux valeurs humaines. Mais les valeurs
humaines24
sont incapables d’élever l’homme au dessus de sa condition,
l’homme de la Chute.
C’est
en redevenant homme, en se replongeant dans sa concupiscence
humaine, par un retour brutal de son
animalité tenue en bride par la grâce ou de son violent orgueil
déchainé que l’homme perd toute retenue et s’abîme dans la
démesure sauvage.
« Sans
moi vous ne pouvez rien faire » (St Jean 15-5) « Je
peux tout par celui qui me fortifie (St Paul Phil.
4-13)
Si,
comme nous devons le croire, Jésus est l’Église selon la
forte parole de Ste Jeanne d’Arc « m’est avis que c’est
tout un de Jésus Christ et de son Église » (parole
rappelée dans le Catéchisme de l’Église Catholique du
Bienheureux Jean Paul II avec cette autre : « Là où est
le Christ Jésus, là est l’Église Catholique "
(S. Ignace d’Antioche, Smyrn. 8, 2) c’est à elle qu’il faut
revenir car ce n’est pas elle qui a fauté au Rwanda c’est
l’homme qui a rechuté. L’homme revenant à sa nature
–blessée et imparfaite- faute de la grâce –dispensée par
l’Église- retourne à la cruauté ; humaniser c’est
retomber ! (Voir in fine un exemple d’humanisation :
exposition Piss Christ).
Faire
accomplir à l’Église cette mutation missionnaire d’humaniser
au lieu d’Évangéliser,
lui faire enseigner et propager les valeurs humaines au lieu des
Commandements de Dieu, des Béatitudes et du précepte de perfection
(« soyez parfaits…) c’est
changer
l’injonction du
Seigneur en la soldant
pour un message terrestre : « Allez
dans le monde entier, et prêchez
l'Evangile à
toute créature. Celui qui croira
et qui sera
baptisé, sera
sauvé; mais celui
qui ne croira pas sera condamné. »
(St Marc 16 :15-16) « Allez
donc, enseignez toutes les nations, les baptisant
au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, et leur
enseignant à observer tout ce que Je vous ai commandé.
Et voici que Je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la
consommation des siècles. » (St Matthieu 28 :19-20).
Humanæ
Vitæ :
« Juda
dit donc à Onan, son second fils: Epouse la femme de ton frère et
vis avec elle, afin que tu suscites des enfants à ton frère.
Onan,
voyant la femme de son frère, et sachant que les enfants qui
naîtraient d'elle ne seraient pas à lui, empêchait qu'elle ne
devînt mère, de peur que ses enfants ne portassent le nom de
son frère.
C'est
pourquoi le Seigneur le frappa de mort, parce qu'il
faisait une chose détestable. »
(Genèse 38,8-10).
Cohérent avec cette volonté
d’humaniser au lieu de sanctifier le Cardinal sonne
une charge irascible contre la grande encyclique du Pape Paul VI
Humanæ Vitæ (25 juillet 1968) qui selon lui, plus que les
conséquences de Vatican II, a désertifié l’Église de ses
fidèles refusant la doctrine du Pape sur la régulation des
naissances25.
En effet dans cette encyclique très doctrinale, rappelant une
constante de l’enseignement du Magistère depuis toujours en
matière de morale sexuelle, s’appuyant sur des données
fortement argumentées Paul VI réprouve, comme ses prédécesseurs26
et comme le feront aussi vigoureusement ses successeurs, les moyens
artificiels de contrarier les conséquences de l’acte sexuel. Le
Pape ne méconnait pas les difficultés et les exigences du
comportement naturel vertueux mais il sait qu’il est possible car
« Dieu ne commande jamais l’impossible, mais en commandant il
dit de faire ce que nous pouvons, de demander ce que nous ne pouvons
pas, et il nous aide pour que nous le puissions » (Concile de
Trente). Dans son texte Paul VI écrit : « il
n'est pas permis, même pour de très graves raisons, de faire le mal
afin qu'il en résulte un bien , c'est-à-dire de prendre comme objet
d'un acte positif de volonté ce qui est intrinsèquement un désordre
et, par conséquent, une chose indigne de la personne humaine, même
avec l'intention de sauvegarder ou de promouvoir des biens
individuels, familiaux ou sociaux. C'est donc une erreur de penser
qu'un acte conjugal rendu volontairement infécond et, par
conséquent, intrinsèquement déshonnête, puisse être rendu
honnête par l'ensemble d'une vie conjugale féconde ». Et
il termine son encyclique ainsi, s’adressant aux évêques (et
cardinaux !) : « Ne diminuer en rien la salutaire
doctrine du Christ est une forme éminente de charité envers les
âmes….Considérez cette mission comme l'une de vos plus urgentes
responsabilités dans le temps présent puisque l'homme ne peut
trouver le vrai bonheur, auquel il aspire de tout son être, que dans
le respect des lois inscrites par Dieu dans sa nature et qu'il doit
observer avec intelligence et amour. »
Certes, comme toujours en la
matière, l’Église ne choisit pas la facilité, la démagogie,
elle ne flatte pas l’homme, elle ne va pas dans le sens
de la pente, elle est toujours fidèle à son fondateur, sa Tête,
son Époux qui est monté à la Croix car il a « rendu
témoignage à la vérité ». St Paul écrivit aux
Galates : «Si je plaisais encore aux hommes, je ne serais
pas serviteur du Christ. » (Gal.1 :10).
L’Église n’a pas été fondée
pour humaniser mais pour diviniser. C’est un
grand écart avec la subtile obsession du Cardinal. L’humanité en
veut à l’Église romaine pour cette vérité, cette générosité
qui lui est demandée, cette noblesse de comportement qu’elle
appelle ; l’humanité dévoile de la sorte la lourdeur
charnelle de ses choix. N’oublions jamais que le monde ne
rejette pas seulement l’enseignement d’ Humanæ Vitæ, ce
qu’il rejette c’est la CROIX et les vertus chrétiennes
exigeantes et sublimes. Le monde ne se contentera pas de l’abandon
de cette obligation demandée par l’Église (et du reste conforme à
la loi naturelle) il réclamera ensuite le renoncement à tout
ce qui s’oppose à ses désirs et plaisirs. Pour satisfaire ses
convoitises l’Église ne serait jamais assez riche.
Mais la loi du Créateur est
faite pour le bonheur non pour le plaisir. Un jour viendra où le
jour ne venant plus, viendra « la Lumière qui éclaire tout
homme » et tous comprendrons la sagesse de notre Mère.
L’humanisation n’est
qu’une ambition maçonnique à la base de tous les projets destinés
à écarter, de fait, l’Église et le catholicisme de toute
influence sur la société ; c’est une arme pour chasser la
mission évangélisatrice qui fut toujours d’apporter aux hommes
Jésus Christ et sa Croix, pour leur salut. L’humanisation qui
est sans cesse présentée comme un progrès est donc l’opposé
de la christianisation. Charles Péguy l’avait bien vu quand
il disait : « il n’y a que deux religions, la
religion du progrès et la religion du salut ».
« Une
autre église, invisible » :
Avant
d’appliquer ce qu’on doit bien appeler le programme d’une
Église autre, invisible( page 409), le Cardinal la
définit comme portant «la tendresse que ressent Dieu pour
chacun des hommes » ; il répète à plusieurs
reprises cette formule de la même façon (pages 312,314,350, 351 2
fois) ce qui indique qu’il l’a longuement mûrie et qu’elle
énonce vraiment le contenu de cette « Église invisible »
(page 409, en fin de livre, donc aboutissement terminal de sa
longue démonstration).Il s’exprime ainsi : « nous
avons l’intime conviction d’être en train de proposer de
nouveaux modèles d’être réellement
chrétiens…Et nous savons, je le répète, que le
temps travaille pour nous. »(Page 410).s
Tout
ceci mérite d’être « compté, pesé, divisé »
(Daniel 5 :25)27
afin de confronter ce qui se révèle ainsi comme un plan avec le
plan du Seigneur Jésus dont il a confié la mise en œuvre à ses
Apôtres.
Faute
d’une explicitation plus claire le « nouveau modèle
d’être réellement chrétien » c’est donc de partager
« la tendresse que ressent Dieu pour chacun des
hommes », programme affectif mais réducteur, au contour
imprécis et ouvert à toutes formes de réalisation, sans
obligations précises, théâtral mais finalement laissant à chacun
sa subjectivité pour agir selon sa propre manière d’entendre
le précepte. Voilà donc un credo minimal, plus
petit commun multiple d’un vague élan subjectif séduisant mais
anémié, un credo de pygmée à article unique. Car comment se
manifeste cette « tendresse » sans le don de la Croix,
jamais évoqué ; et qui est ce Dieu, quels sont son visage, ses
qualités, sa nature, la portée et le prix de son Amour ?
Plutôt que « tendre » ne serai ce pas un Dieu « mou » ?
Qui, indéfini plutôt qu’infini permet tout, supporte
tout et ne réprouve rien.
Et
bien je dis au Cardinal que son nouveau modèle va se disperser en
une infinité de modes de penser et de faire et ce « nouveau
modèle » se dissipera en une profusion de chapelles qui
prétendrons chacune détenir le bon mode d’emploi. C’est ainsi
que dix ans plus tard avaient déjà subi la dispersion de doctrine,
de foi, de pratiques et de cultes les confessions luthériennes nées
du même Réformateur. Et encore celui-ci avait-il formalisé sa
doctrine autre que catholique en 95 thèses dites « de
Wittenberg »où il résumait sa Réforme. Réformer l’Église
est une présomption, sans doute aussi un orgueil, qui n’est pas
accessible à tous et que nul n’a jamais réussi s’il n’était
Saint c'est-à-dire d’abord soumis à l’Église sa Mère.
Proposer une aussi indigente ligne de conduite qu’appliquer «la
tendresse que ressent Dieu pour chacun des hommes » avec,
en plus, « une Église invisible »
ne craignons pas de le dire est déjà voué à l’échec. Car
faire un Église invisible c’est sortir de l’Église
visible qu’a fondée Jésus Christ.
Le
Seigneur a voulu une Église visible, d’emblée il l’a
établi hiérarchique avec Pierre à la tête et comme
fondement après son propre départ, doté de la promesse de
l’indéfectibilité. Avec les Apôtres comme détenteurs des
pouvoirs de lier et délier, de remettre les péchés, de dispenser
la grâce…C’est si vrai que dès la perte de Judas le collège
apostolique procède à son remplacement immédiat par Matthias qui
est sacré « évêque » ainsi que nous appelons
aujourd’hui les successeurs des Apôtres. Le ministère visible
ne souffre aucune vacance.
Saint
Paul est il sitôt terrassé par la Lumière du Christ vers Damas que
Jésus en personne l’envoie vers un homme de son Église, un
« ancien28 »
Ananie, pour être guéri29,
instruit et baptisé ; Dieu veut que sa grâce
s’écoule par le canal des hommes pécheurs, par une médiation
visible, donc une église visible de pécheurs afin de
ne pas décourager les pécheurs d’y entrer. Une Église de
Parfaits ou d’Anges sans fautes aurait chassé les misérables
déchus que nous sommes, incertains d’être compris et pardonnés
au tribunal de la pénitence et de la miséricorde. Dieu transmet la
grâce parfaite par des hommes imparfaits, les moyens divins
de sanctification passent par les mains déficientes des hommes car
Dieu a encore confié « à l’Église et à des personnes son
autorité et ses lumières pour nous diriger »30
. La considération de notre faiblesse et de notre infirmité et de
nos chutes est destinée à montrer qu’a travers notre canal
déficient c’est bien Lui, le Seigneur qui agit efficacement31.
C’est pourquoi déprécier l’Église est une faute contre Dieu en
personne.
Une
Église invisible est-ce une Église sans dogmes, sans culte
organisé, sans sacrements, sans hiérarchie et sans sacerdoce ?
C’est bien en effet ce que pense le cardinal. Il n’est pas ému
par la disparition des prêtres, voici ce qu’il en dit :
« l’écho d’un réflexe solidement ancré consiste à
penser que s’il n’y a plus de prêtres il n’y aura plus
d’Église, parce que c’est ainsi que nous avons fonctionné
depuis des siècles : là où était le prêtre, là était
l’Église….D’une part l’Église n’a pas toujours
fonctionné comme cela, et d’autre part nous
pouvons parfaitement et légitimement inventer d’autres manières
de nous comporter »(Page 385). Terrible analyse qui consent
de fait à la disparition de l’Église.
Car
pas de prêtres, pas de sacrements ; pas de sacrements, pas de
grâce, pas de pardon, pas de nourriture super substantielle, pas
d’unité de foi mais un éparpillement de croyances et de cultes
foisonnants et dégradés. Le Cardinal croit il que faute d’Église
visible Dieu va inspirer directement à chaque homme
l’interprétation correcte des livres saints ? Comme le
pensait Luther32.
Le saint Curé d’Ars disait « quand il n’y aura plus de
prêtres, on adorera les bêtes ».
Mais
là encore le cardinal X est dans son tort car
JAMAIS l’Église n’a « fonctionné comme
cela ». Il suffit de relire les premiers chapitres des « Actes
des Apôtres » c'est-à-dire l’histoire (inspirée) de
l’Église qui suit immédiatement l’Ascension du Seigneur et nous
y verrons la consolidation de la Hiérarchie (élection et
ordination de St Matthias comme Apôtre pour remplacer Judas
Act.1 :22-26) et son organisation structurée (Act.
6 :2-6), la confirmation du pouvoir pontifical de St
Pierre (Act. 1 : 15), la pratique communautaire du culte
(Act.1 :14), la prédication publique missionnaire (Act.2 :
14-36 & Act.3 :12-19) la pratique de la pénitence
et des sacrements de Baptême et Confirmation (Act.1 :19 &
3 :38).
Dieu
a encore voulu une Église visible en ses sacrements dont il a
subordonné la validité, donc l’efficacité opérative, à la
contribution de la matière visible (en sus de la forme
constituée par la formule rituelle) afin de transmettre la grâce
invisible en vue de la sanctification ; pas de Baptême
sans eau, pas de confirmation sans chrême, pas
d’Eucharistie sans pain ni vin, pas d’extrême onction
sans huile sainte etc.… Certes Il aurait pu donner
son efficacité au sacrement par la forme seule (les paroles du
ministre sacré) ; il ne l’a pas voulu car c’est par le créé
visible, sensible, qu’il veut nous faire accéder à la
connaissance des réalités cachées, invisibles. Notre Dieu est un
Dieu incarné en son Fils. Pourrait-il en être
autrement de l’Église qui en est le Corps ?
Dieu
n’a-t-il pas gravé dans la pierre la Loi naturelle des dix
commandements ? Lui donnant forme visible.
Enfin,
le cardinal a t il oublié les déclarations solennelles de l’Église
elle-même sur soi ? :
Catéchisme
de l’Église catholique de Jean Paul II :
771
" Le Christ, unique médiateur, constitue et
continuellement soutient son Église sainte, communauté de foi,
d’espérance et de charité, ici-bas, sur terre, comme un tout
visible par lequel il répand, à l’intention de tous, la
vérité et la grâce ". L’Église est à la fois :
– " société
dotée d’organes hiérarchiques et Corps Mystique du
Christ ;
– assemblée
visible et communauté spirituelle ;
– Église
terrestre et Église parée de dons célestes ".
Et
la Constitution Lumen Gentium de Vatican
II chapitre 8:
« .
Cette société organisée hiérarchiquement
d’une part et le corps mystique d’autre part, l’ensemble
discernable aux yeux et la communauté spirituelle,
l’Église terrestre et l’Église enrichie
des biens célestes ne doivent pas être considérées
comme deux choses, elles constituent au contraire une seule réalité
complexe, faite d’un double élément humain et divin
C’est
là l’unique Église du Christ,
dont nous professons dans le symbole l’unité, la sainteté, la
catholicité et l’apostolicité [12],
cette Église que notre Sauveur, après sa résurrection, remit à
Pierre pour qu’il en soit le pasteur (Jn
21, 17), qu’il lui confia, à lui
et aux autres Apôtres, pour la
répandre et la diriger (cf. Mt
28, 18, etc.) et dont il a fait pour toujours la « colonne et le
fondement de la vérité » (1 Tm
3, 15). Cette Église comme société
constituée et organisée
en ce monde,
c’est dans l’Église catholique qu’elle subsiste,
gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques qui sont en
communion avec lui »
Déclaration
« Dominus Iesus » 16 juin 2000 (Jean Paul II) :
“le
Royaume tel que l'entendent des formulations unilatérales , finit
par marginaliser ou sous-estimer
l'Église, par réaction à un “ecclésiocentrisme”
supposé du passé et parce qu'elles ne
considèrent l'Église elle-même que comme un signe,
d'ailleurs non dépourvu d'ambiguïté ».Ces thèses sont
contraires à la foi catholique
parce qu'elles nient l'unicité de rapport du Christ et de l'Église
avec le Royaume de Dieu.”
Que
resterait-t-il de la mission et du rôle évangélisateur d’une
Église invisible,
impalpable33 ?
«Du
pain, du riz, d’autres peuvent en donner à l’homme, mais
si l’Église ne donne pas la Parole de Dieu, qui la donnera »
(Père Bruckberger).
L’Église
invisible du Cardinal invisible est une invention déiste34
pour agnostique désabusé, une institution libre, vaporeuse et
éthérée qui vous permet la libre pensée35.
Mais
ce n’est pas l’Église de Jésus Christ.
Le
principe de Poo :
Le
Cardinal fait le récit de ses séjours en Thaïlande qu’il
partagera quelque temps avec son interlocuteur écrivain en novembre
2005 (page 287 et suivantes). Dans une maison d’enfants malades le
Cardinal assiste de longues heures l’un d’eux, nommé Poo,
atteint du SIDA en stade terminal. Silencieux, communiquant peu avec
le malade à cause de l’obstacle de la langue, il se borne à le
veiller, être présent, faire quelques gestes simples de douceur
(l’essuyer, presser sa main, le regarder) (page 308). Attitude
pleine de charité personnelle forte, poignante, généreuse. C’est
la face lumineuse et pleine d’abnégation du Cardinal dont il va
dégager une théorie irrecevable. Décidément l’homme est souvent
bienfaisant en sa pratique et bien hasardeux en ses opinions. C’est
toute l’ambiguïté redoutablement séduisante, déroutante mais
funeste de la personnalité qui fait, ici, le bien, et enseigne, là,
l’équivoque. De la sorte il brouille toutes les pistes sur sa foi.
« -Apprenez-vous
le catéchisme aux enfants malades du centre qui vous font la fête
quand vous sortez dans la cour… ? Le Cardinal :
- Bien sûr ! Vous l’avez constaté vous-même. Je
leur fais ce catéchisme quand je m’occupe d’eux, quand je les
aide à prendre leur médicament, quand je leur apprends un peu
d’anglais ! Je ne leur fais pas un catéchisme de questions et
de réponses, j’essaie de leur faire découvrir ce que c’est
d’être aimé et d’aimer. » (Page 314).
Fort
bien ! Mais si « la foi qui n’agit pas est-ce une foi
sincère ? »36
« la charité sans enseigner, évangéliser, est-ce une charité
entière ? ». Car St Paul nous dit que « la
charité trouve sa joie dans la vérité » (1
Corinthiens 13,6) et nous savons que la première Charité qui est
d’aimer Dieu est donc de lui obéir dans son exhortation
« allez, enseignez toutes les nations… ».
Le
bien qu’il fait par sa présence muette est certain, le bien qu’il
ferait par son témoignage de Jésus Christ s’ajoutant à sa
bienfaisance serait parfait. Car l’un procure la
compassion mais l’autre procure le SALUT. Certes il cite
l’obstacle de la langue mais il n’en fait pas la raison
de son comportement. Car celui-ci est plus radical, doctrinal :
l’évangélisation et la présence muette sont équivalents.
Il nous répète là sous une autre forme son credo :
l’humanité c’est l’évangile, humaniser c’est évangéliser.
Au
fond, le Cardinal accomplit une mission d’ONG, non d’Église et
sa vertu est la philanthropie, l’altruisme, non la Charité, vertu
surnaturelle37:
Catéchisme
de l’Église Catholique : « 1822. La charité est
la vertu théologale par laquelle nous aimons Dieu
par-dessus toute chose pour Lui-même, et notre
prochain comme nous-mêmes pour l’amour de Dieu.
1824. Fruit de l’Esprit et
plénitude de la loi, la charité garde les
commandements de Dieu et de son Christ :
" Demeurez en mon amour. Si vous gardez mes
commandements, vous demeurerez en mon amour "
(Jean 15, 9-10 ; cf. Matthieu 22, 40 ; Romains 13, 8-10).
Quant
à sa saillie déplaisante sur le jeu de « questions/réponses»
où le catéchisme serait réduit à un échange trivial de vulgaire
ping-pong obtus, elle participe à sa stratégie de vocabulaire
dépréciatif destiné à déconsidérer tout ce qui est doctrinal,
tradition, enseignement structuré et hiérarchie dans l’Église.
Décidément rien n’échappe dans ce domaine au ricanement grinçant
du prélat.
Mais
au fait, son livre, n’est il pas AUSSI qu’« un catéchisme
de questions et de réponses » ?
Quand
on triche avec la vérité, la vérité vous guette en embuscade.
« Retrouver »
l’Évangile :
Dernière
étape et but du Cardinal.
En
« inventant d’autres manières
de nous comporter » (page 385). Dans ce propos plein de
présomption nous retrouvons encore les grands prétendus
réformateurs qui, enjambant des dizaines de siècles d’Église,
remontant anachroniquement le cours du temps, comme on pourrait
remonter un fleuve, réinventent une nouvelle manière
de vivre l’Évangile (étant d’ailleurs dépourvus de volonté et
de désir de le répandre !). L’Évangélisme fut toujours une
utopie – meurtrière de surcroît (comme le montre l’histoire des
Réformateurs Luther, Calvin, Henri VIII ; lire aussi « le
roi des derniers jours » Barret /Gurgand Hachette1981 et « le
phénomène socialiste » Igor Chafarévitch Seuil 1977).
L’évangélisme fut toujours une insurrection contre le
catholicisme puisqu’il présume qu’Évangile et Église ont
divergé et sont désormais en état de divorce irrémédiable. C’est
donc à la fois, une désespérance et une incrédulité contraire à
la foi. Celle ci nous rappelle la promesse irrémissible du
Sauveur : «Je suis avec vous TOUS LES JOURS jusqu’à
la fin du monde » (Matthieu 28 :2) et « j’ai
prié pour toi afin que ta foi ne défaille pas » (Luc
22 :32). Une promesse et une prière, divines,
donc précieuses et opérantes.
Comme
si 2000 ans d’Église avaient servi à enfouir l’Évangile à
vivre et à prêcher sous les tapis du Vatican ! Et comme si un
homme, fût-ce un Cardinal ou un groupe occulte38,
étaient qualifiés, envoyés (par qui ?)39,
mandatés, pour « restaurer » l’Évangile perdu,
ou trahi, ou enseveli.
La
doctrine de l’Évangélisme est plus encore qu’une faute contre
le bon sens catholique une erreur historique de la raison elle-même.
Car ce n’est pas l’Évangile qui a engendré l’Église, c’est
l’Église qui nous a donné l’Évangile. Bornons nous à
citer cette démonstration brève mais apodictique de Guillaume
Estius40
dans son Enchiridion : « le Christ n’a écrit
aucun livre ; il n’a pas davantage ordonné à ses disciples
ou à ses apôtres d’en écrire ; l’Église est
plus ancienne que l’Écriture. Quand les Apôtres
commencèrent de prêcher, il n’y avait pas d’Évangile écrit,
aucune épître de St Paul ; et cependant l’Église
existait, fondée par le sang du Christ ».
C’est pourquoi St Augustin
écrivait : « Nous
ne voyons pas encore le Christ, mais nous voyons l’Église :
croyons donc au Christ. Les Apôtres, au contraire, voyaient le
Christ, mais ils ne voyaient pas l’Église si ce n’est par la
foi. Ils virent une chose, ils en crurent une autre : faisons de
même. Croyons au Christ, que nous ne voyons pas encore ; et en
restant unis à l’Église que nous voyons, nous parviendrons enfin
à voir celui que nous ne pouvons pas encore voir. »
St Augustin (sermon 238).
La
Tradition :
« Je
vous rappelle, frères, l'Evangile que je vous ai prêché,
que vous avez reçu, dans lequel vous demeurez fermes, et par
lequel vous serez sauvés, si vous le retenez tel
que je vous l'ai prêché: à moins que vous n'ayez cru en
vain. Car je vous ai transmis en premier
lieu ce que j'ai moi-même reçu. »
(I Cor 15,1-3).
On
comprend que la méconnaissance ou l’erreur sur les relations
intimes, consubstantielles, entre Église et Évangile ait
engagé le Cardinal vers un jugement si injuste et si irrecevable sur
la nature de la Tradition dans laquelle il ne voit que
« entassement…décisions entassées à
travers le temps les unes sur les autres, toutes gardant le même
caractère de certitude ». (Page 121).
Or
tout est faux dans cette vision de la Tradition :
- Un « tas » est une accumulation de choses de même nature avec ou sans ordre. Au demeurant le mot entassement résonne péjorativement et l’est bien selon la définition « accumulation excessive et désordonnée »41 ; manifestement le cardinal veut discréditer le mot (pour mieux noircir la chose ?).
- La tradition n’accumule pas les décisions « les unes sur les autres », elle les hiérarchise, les ordonne selon leur matière, leur degré de crédibilité et de véracité, leur harmonie avec la Révélation, leur correspondance avec les besoins missionnaires de l’Église.
- Les degrés de certitude ne sont ni équivalents ni homogènes et l’Église sait là encore hiérarchiser les données du révélé transmis par la Tradition puisque 1) elle reconnait celle-ci comme source authentique du Révélé42 et 2) le Magistère de l’Église nous en donne le sens et la compréhension irréfutables puisque inspiré.
La
tradition nous a transmis la loi, la discipline, ou plutôt la
constitution chrétienne et les Écritures. Toutes ces choses,
sorties de la même source et comme du même moule, reproduisent le
même corps de doctrine et de société : elles se donnent un appui
mutuel et demeurent inséparables. Il y a seulement cette différence
pour les saintes Écritures, qu'elles sont venues les dernières,
lorsque l'Église marchait déjà dans les premiers temps des
Apôtres; qu'elles sont venues comme par occasion, successivement, et
que grand nombre d'églises ont encore marché plus ou moins
longtemps, sans les posséder que par parties, et même en étant
tout à fait privées, comme saint Irénée le rapporte de nations
barbares qui étaient chrétiennes et ne possédaient aucune
Écriture. Ainsi les Écritures, nécessaires pour donner du corps et
quelque chose d'immuable à l'enseignement oral pour la durée des
siècles, ne le sont pas absolument pour la foi; tandis que la forme
traditionnelle demeure dès l'origine comme la forme vivante et
essentielle de l'Église et de tous ses enseignements.
Tel
est aussi l’enseignement du Bienheureux Cardinal Newman :
« Le texte sacré des Écritures ne fut jamais destiné à
enseigner la doctrine, mais seulement à la prouver ; pour
connaître celle-ci, il faut recourir aux formulaires de
l’Église, par exemple au catéchisme ou aux symboles ».
C’est le démenti de ce que le Cardinal commente sur la nécessité
du catéchisme dont il dénigre la valeur et le sens.
La
Sainte Tradition c’est la Transmission intacte et sacrée de la
doctrine du Fondateur, non un « entassement » cumulatif
de Bulles et de paperasses doctrinales ; le Cardinal en a une
vue d’archiviste de préfecture, les saints y voyaient l’horizon
qui s’offrait à des nains43
juchés sur des épaules de géants44
(l’image est de St Bernard).
La
faction et l’anonymat :
« Celui qui me suit ne
marche point dans les ténèbres »45
(Jean 8 :12)
Si nous avons suivi pas à pas le
déroulement de la pensée cardinalice il sera manifeste que sa
représentation du futur de l’Église est sombre et dévoyée. Ses
analyses et projections exhalent un parfum délicieusement
hétérodoxe, irrévérencieux et dissident. C’est son droit ;
mais alors son devoir est de parler à visage découvert ;
« Larvatus prodeo » (« je m’avance masqué »)
devise de Descartes est une formule d’homme fort et plutôt
métaphorique chez lui.46
Or ce courage, le Cardinal ne l’a
pas. Pourquoi ? Il n’y a plus de bûchers, il n’y a plus
d’Inquisition47
et les censures de l’Églises – rares et indulgentes- n’ont
plus que très peu d’effets. Que craint-il ? Ou encore :
qu’est-ce que cela cache ?
Bien
qu’il fasse état à de nombreuses reprises de contacts, de
groupes, d’affinités organisées quoique diffuses (page 371),
« d’un
certain nombre d’initiatives qui ont surgi ou vont surgir »
(spontanément ?) (Page 372), « d’hommes
et de femmes engagés dans des actions voisines (lesquelles ?),
qui aiment se rencontrer »
(page 372), «nous
sommes un certain nombre à accepter de penser
l’impensable48 »
qui « proposent
de nouveaux
modèles
d’être réellement
chrétiens»
(les modèles actuels ne le sont plus ?) et dont « nous
savons, je le répète, que le temps travaille pour nous »
(page 410) il
réfute le possible soupçon de COMPLOT
qui émerge
naturellement à la lecture successive des caractéristiques du
groupe dépeint. Mais ces dénégations ne convainquent pas car elles
ne lèvent jamais le voile de son identité à lui ni des buts réels
concrets poursuivi par ce parti
dont les
desseins sont sibyllins, mystérieux, énigmatiques et toujours
discrets (voire secrets). Or notre Maître est venu dans la Lumière
(Prologue de st Jean), il répliqua au Grand Prêtre : « J'ai
parlé ouvertement
au monde; J'ai toujours enseigné dans la synagogue et dans le
temple, où tous les Juifs s'assemblent, et Je
n'ai rien dit en secret ».
(Jean 18,20).Le secret cache
souvent une action incertaine, douteuse ; l’Église a toujours
argué –parmi les autres motifs doctrinaux- contre la Franc
Maçonnerie, sa pratique du secret. Saint Paul nous met aussi en
garde : « Ne prenez
point part aux œuvres infructueuses des ténèbres, mais plutôt
condamnez-les.
Car ce qu'ils pratiquent en
secret, on a honte même de
le dire seulement. Mais tout ce qui est condamné est manifesté par
la lumière; car tout ce qui
est manifesté est lumière »
(Ephésiens 5,11-13).
Monsieur
le Cardinal, toute révérence gardée, votre anonymat ne me dit rien
qui vaille. Ni le brouillard qui enveloppe votre ultime but.
On
nous annonce un deuxième entretien qui s’intitulera
« l’Esperance ». Dévoilerez vous votre identité, vos
buts précis, votre doctrine, vos amis, les
conséquences de vos choix ?
Pour
l’honneur et la vérité de notre Mère l’Église moi aussi
j’espère, j’espère un message moins déprimant, plus roboratif,
plus exact, plus équilibré, plus respectueux de la Majesté et de
la dignité de l’Église catholique car il n’y a pas
lieu de rougir d’Elle.
« Si quelqu'un rougit de
Moi et de Mes paroles au milieu de cette génération adultère et
pécheresse, le Fils de l'homme rougira aussi de lui, lorsqu'Il
viendra dans la gloire de Son Père, avec les Anges saints. »
(Marc 8,38)
Jacques
Camredon.
Un
exemple d’humanisation :
Andres Serrano -
Saint Andres des arts
06/05/1998
| 03H01
Du
sang, de l'urine et du sperme : la galerie Yvon Lambert expose
les Fluids d'Andres Serrano, liturgie sacrilège
d'un observateur des hauts et bas de l'âme
humaine.
De l'abstraction
corporelle, Serrano glisse vite vers l'immersion de figures dans
l'urine et c'est là que les ennuis commencent. Passe encore
d'immerger le visage de Dante. Mais son Piss Christ (1987)
heurte un tabou religieux qui fait hurler la droite et provoque une
polémique d'une rare violence contre le système de subvention des
arts plastiques aux Etats-Unis (le National Endowment for the
Arts). Le TV-évangéliste Pat Robertson accuse le photographe de
"gifler les valeurs que chérissent la plupart des
Américains".
L'image
de ce Christ en croix plongé dans l'urine auréolé d'un halo
sacré et visqueux n'était pourtant
"pas antichrétienne", explique Serrano. "L'idée
était plus d'humaniser la
figure du Christ. Mon but en fin de compte est de faire
de beaux objets à partir de matériaux non orthodoxes. Mais j'étais
un peu naïf. Je ne m'attendais pas à de telles réactions. J'ai été
surpris par la haine que ça a suscité. A l'époque, je ne pensais
pas que quelqu'un verrait ces images, encore moins qu'elles seraient
vendues." Dix ans plus tard, la photo fait de nouveau
scandale en Australie. Une rétrospective Serrano ferme l'année
dernière au bout de quelques jours, quand un visiteur enragé par la
photo la détruit. Protestations des autorités religieuses,
manifestation anti-Serrano dans les rues de Melbourne et panique du
directeur du musée qui interrompt l'exposition... Commentaire du
photographe : "Je ne me suis jamais senti aussi célèbre."
Ironie un brin amère qui correspond à la distance clinique qu'il
entretient avec ses sujets.
1
Le Cardinal n’a pas souhaité que son
identité soit révélée. Il a d’ailleurs une relation très
débilitante avec la notion d’identité,
particulièrement celle de
l’Église. Je dirai plus loin de quoi cet
anonymat
est le signe.
2
Déjà en
1963 il y a un demi siècle, un
protestant, professeur d’Université à Bordeaux, Jacques
Ellul écrivit – en plein
Concile- un livre intitulé « Fausse
présence au monde moderne »
(Édition : Tribune libre protestante). On ferait bien de le
relire.
3
Anachronique car on s’entête à
juger les siècles antérieurs
avec nos critères actuels et
l’on commet donc une injustice et une torsion de perspective.
Sommes-nous indemnes d’erreurs et de crimes pour juger nos
ancêtres et surtout connaissons-nous parfaitement les
ressorts, les arcanes, les circonstances et les motivations pour que
notre jugement soit vraiment éclairé ? Que dira-t-on de nous
dans deux siècles ?
4
Définition du dictionnaire CNTRL :
Doctrine selon laquelle la connaissance
historique permet d'expliquer la totalité ou certains aspects du
devenir humain. (http://www.cnrtl.fr/definition/historicisme).
5
« La
forme quasi définitive du Canon, à l’exception du Memento des
défunts (qui apparaîtra à l’aube du VIIIe siècle) pourrait
être datée de la fin du Ve
siècle, puisque le missel
manuscrit de Stowe daté du IXe siècle le nomme « le Canon du
Seigneur, du pape Gélase » ».(
La messe de saint Justin à saint Grégoire
par Emmanuel de Butler, OSB dans La
Nef n°108, janvier 2001). Le Père
Amiot professeur à Saint Sulpice dans son livre savant « Histoire
de la Messe » (1956 collection Je sais-Je crois Fayard)
attribue lui cette prière du canon à l’époque du Pape Symmaque
(†514) : les deux avis sont concordants puisque St Symmaque
fut pape deux ans après la mort de St Gélase.
6
Jésus lui-même ne nous a-t-il pas dit
« vous êtes dans le monde, mais vous n’êtes pas du
monde » (St Jean 17 :14-18).
7
Il suffit de consulter la monumentale
« Histoire de l’Église » de Fliche et Martin en 21
tomes ou celle de Rohrbacher en 15 tomes.
8
Doctrine opposée au nestorianisme mais
aussi erronée que lui en sens inverse ; professée par
Eutychès elle ne reconnaissait qu’une nature au Christ, la nature
divine. Elle fut condamnée au concile de Chalcédoine en 451.
9
Patriarches et évêques emprisonnés,
exilés, déchus abondent durant tout l’Empire romain après
Constantin.
10
Doctrine inventée de fraîche date
pour qualifier le prétendu statut triomphant et privilégié de
l’Église dans la société après la conversion de l’empereur
Constantin et son édit de Milan (313).
11
Le Pape Innocent XII refusera ces
Quatre Articles, inacceptables pour l’Église. L’Église
gallicane finira par reconnaitre son erreur. Mais les quatre
articles préfiguraient la funeste Constitution civile du clergé de
la révolution.
12
Pie VII se contenta alors de lui dire
cette parole prophétique « votre
bonheur est passé ».De ce
jour Napoléon marcha de défaites en défaites.
13
Le développement sur Galilée qui suit
doit beaucoup à l’excellent ouvrage « Croisades,
inquisitions…Faut-il demander pardon ? » Éditions
du MJCF. L’affaire Galilée y est développée avec beaucoup de
détails. Sa lecture est indispensable à qui veut connaitre
exactement le déroulement des faits et la VRAIE position de
l’Église.
14
Le livre de Koestler, passionnant, est
l’histoire des débuts de l’astronomie moderne à partir du XVI°
siècle (Copernic, Galilée, Tycho Brahé, Kepler, Newton).
15
Cette indignité là fut en revanche
celle du Sanhédrin qui condamna Jésus ; voici ce qu’en dit
Saint Augustin : « Ils disaient entre eux les
Romains viendront et détruiront notre ville. Ils
craignirent de perdre leur puissance et ne pensèrent point à la
vie éternelle, et ils perdirent
ainsi l’une et l’autre. »
16
Il faut souligner, à l’encontre de
la réputation « enfermée » faite à Pie IX, qu’il
invita à participer au futur concile les évêques orientaux
Orthodoxes, les « frères chrétiens séparés »
Protestants et les Anglicans. Excepté des anglicans TOUS les autres
refusèrent, raillèrent ou gardèrent le silence. L’œcuménisme
ne date pas de Vatican II.
17
Il prétend que « vingt
pour cent des 700 évêques
présents quitta l’assemblée » soit 140
évêques. Page 234/235.
18
« Histoire générale de
l’Église » (chapitre XIII tome VIII Bloud et Gay 1919)
par Fernand Mourret professeur d’histoire au séminaire St
Sulpice. Fliche et Martin dans le tome 21 de leur « Histoire
de l’Église » consacré au règne de Bhx Pie IX donnent
pour la pétition des évêques en faveur de l’infaillibilité 380
signatures sur la pétition collective et 100 individuelles soit 480
pétitionnaires. Pour le vote final et les évêques qui quittèrent
le concile, les chiffres sont identiques : 535 Oui & 2 Non
et 55 départs.
19
L’infaillibilité ne fut
« utilisée » qu’une fois par Le Vénérable Pie XII
pour proclamer le dogme de l’Assomption en 1950.
20
Lamennais devait quitter l’Église et
terminer sa vie dans l’impénitence. Déjà le pape Léon XII qui
l’avait reçu à Rome quelques années plus tôt l’avait jugé
« halluciné » bien que fortement ultramontain alors. Le
Pape avait prédit son apostasie.
21
Mais Grégoire XVI
qualifié par les ennemis de l’Église de « réactionnaire »
condamna aussi l’esclavage,
toujours en
vigueur encore, par sa Lettre apostolique In
Supremo du 2
décembre 1839 : «: « [...] il arriva enfin que,
depuis plusieurs siècles, il ne se trouvait plus d'esclaves dans la
plupart des nations chrétiennes. Mais, nous le disons avec douleur,
il y en eut depuis, parmi les fidèles même, qui,
honteusement aveuglés
par l'appât d'un gain sordide, ne craignirent point de réduire en
servitude, dans des contrées lointaines, les Indiens, les nègres
ou autres malheureux, ou bien de favoriser cet
indigne attentat
en établissant le commerce de ceux qui avaient été faits captifs
par d'autres » Il condamnait
aussi le
principe qui était l’indigne justification de l’esclavage :
l’inégalité des races.
On se garde bien de rappeler cet acte du Pape Grégoire XVI.
23
« Sans
le mystère du péché originel, le plus incompréhensible de tous,
nous sommes incompréhensibles à nous-mêmes…L’homme est plus
inconcevable sans ce mystère que ce mystère n’est inconcevable à
l’homme. » Pascal
24
On entend souvent parler des « valeurs
humaines » mais on ne les désigne jamais. C’est que l’on
serait bien en peine de le faire car
l’homme n’est pas créateur de « valeurs »
il en est tout au plus le serviteur, l’usager. Que l’on parle
d’amour, de bonté, de solidarité, de justice etc.… tout cela
n’est que des vertus divines ou cardinales chrétiennes,
bien trop souvent dégradées
en simples valeurs
. Les vertus chrétiennes de
Charité, de Justice, de Force, de Tempérance jointes aux
Béatitudes pureté, douceur, miséricorde, paix, allégresse sont
des dons de Dieu qui humanisés sont
dévalorisés et
perdent leur force rayonnante.
25
Le Cardinal insiste fortement sur le
fait que c’est l’encyclique
Humanæ Vitæ
qui a découragé et fait fuir les
fidèles dans les années 1968 et suivantes et non les conséquences
du Concile. Cette allégation, difficile à vérifier, est
toutefois improbable puisque l’Encyclique de Paul VI ne faisait
que répéter et confirmer
une doctrine morale bien établie et solidement tenue par l’Église
depuis toujours. L’Encyclique
n’apportait donc pas une doctrine nouvelle
susceptible de troubler les fidèles
et de les déterminer à déguerpir de l’Église. Ils
connaissaient cette position qui découle d’ailleurs de la Sainte
Écriture elle-même. Le cardinal n’hésite jamais à forcer ainsi
l’histoire ou les faits : de la même façon il avance que le
concile « est l’autorité suprême dans l’Église »
ce qui est une inexactitude condamnée par la bulle Execrabilis
de Pie II de janvier 1460 et
démentie par la Nota Prævia que
Paul VI fit insérer dans la Constitution
Lumen Gentium de Vatican II.
L’autorité suprême et immédiate dans l’Église c’est le
Souverain Pontife.
26
En
particulier Pie XI dans la grande encyclique «Casti
Connubii » 31
décembre 1930 et avant lui Léon XIII dans l’Encyclique Arcanum
divinae sapientiae,
10 février 1880. Méditons -et rappelons au Cardinal X- les paroles
solennelles de Pie XI dans son encyclique sur le sujet de l’usage
illicite des moyens artificiels pour empêcher la vie :
« Comme
certains, s'écartant manifestement de la doctrine chrétienne telle
qu'elle a été transmise depuis le commencement, et toujours
fidèlement gardée,
ont jugé bon récemment de prêcher d'une façon retentissante, sur
ces pratiques, une autre doctrine, l'Église catholique, investie
par Dieu même de la mission d'enseigner et de défendre l'intégrité
des mœurs et l'honnêteté, l'Église catholique, debout au milieu
de ces ruines morales, afin de garder la chasteté du lien nuptial à
l'abri de cette honteuse déchéance, se montrant ainsi l'envoyée
de Dieu, élève bien haut la voix par Notre bouche, et
elle promulgue de nouveau
: que tout usage du mariage, quel qu'il soit, dans
l'exercice duquel l'acte est privé, par l'artifice des hommes, de
sa puissance naturelle de procréer la vie, offense la loi de Dieu
et la loi naturelle,
et que ceux qui auront commis quelque chose de pareil se sont
souillés d'une faute grave.
Devoir
des confesseurs et des prêtres qui ont charge d'âmes. C'est
pourquoi, en
vertu de Notre suprême autorité et
de la charge que Nous avons de toutes les âmes, Nous avertissons
les prêtres qui sont attachés au ministère de la confession et
tous ceux qui ont charge d'âmes, de ne
point laisser dans l'erreur touchant cette très grave loi de Dieu
les fidèles qui leur sont confiés,
et bien plus encore de se prémunir eux-mêmes contre les fausses
opinions de ce genre, et de
ne pactiser en aucune façon avec elles.
Si d'ailleurs un confesseur, ou un pasteur des âmes — ce qu'à
Dieu ne plaise — induisait en ces erreurs les fidèles qui lui
sont confiés, ou si du moins,
soit par une approbation, soit par un silence calculé, il les y
confirmait,
qu'il sache qu'il
aura à rendre à Dieu, le Juge suprême, un compte sévère de sa
prévarication ; qu'il considère comme lui étant adressées ces
paroles du Christ : «
Ce sont des aveugles, et ils sont les chefs des aveugles ; or, si un
aveugle conduit un aveugle, ils tombent tous deux dans la fosse. »
Ces
paroles sont terribles parce que le sujet est la VIE. C’est
donc une terrible responsabilité que prend la Cardinal en
s’opposant résolument à cet enseignement moral (donc pleinement
dans l’aire de l’assistance divine à l’Église) immuable et
renouvelé.
27
Daniel 5 : 24-25 : C’est
pourquoi Il a envoyé l'extrémité de cette main, qui a écrit ce
qui est marqué sur la muraille. Or voici l'écriture qui a été
tracée: Mané, Thécel, Pharès. (Compté,
pesé, divisé).
28
« Ancien » qui vient de
l’Ancien Testament est traduit en grec du Nouveau Testament par
« presbytre » qui donnera « prêtre ».
31
Ainsi l’hérésie Donatiste des IV°
& V° siècles prétendait que les sacrements opérés par les
ministres indignes
étaient invalides.
A ce compte seule une Église constituée de saints était
concevable ; mais le Seigneur, bon connaisseur de la nature
humaine pour l’avoir créée et aussi pour les raisons susdites ne
le voulait pas ainsi. Le Donatisme fut combattu par St Augustin et
terrassé à la conférence de Carthage (juin 411). Luther qui
accusait la hiérarchie catholique et le Pape de toutes les
infamies, en étant d’ailleurs très éloigné lui-même d’une
vie exemplaire, ressuscita le Donatisme. Le Cardinal X, dans ses
exigences et ses jugements historiques erronés s’approche des
arguments donatistes.
32
On sait ce que cela a donné en peu de
temps : la dispersion anarchique des croyances Réformées
aussi contradictoires entre elles qu’incompatibles avec une seule
Confession. Lettre de Luther aux chrétiens d’Anvers en
1525 : « Le
diable est parmi nous :
il m’envoie chaque jour des visiteurs qui viennent frapper à ma
porte : l’un ne veut pas du baptême, un autre rejette le
sacrement eucharistique, un troisième annonce qu’un monde nouveau
sera créé de Dieu avant le jugement dernier, un autre que le
Christ n’est pas Dieu, un autre ceci, un autre cela. Il
y a presque autant de croyances que de têtes.-
Il n’est pas de butor qui, s’il rêve, ne se croie illuminé de
Dieu ou prophète au moins »
Voilà le résultat inexorable et
prévisible d’une Église INVISIBLE.
33
Quand Jésus donna la preuve de sa
résurrection aux Apôtres réunis, les traductions du grec lui font
dire «Touchez moi
et constatez, car un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez
que j’en ai » (St Luc
24 :39). Mais le grec dit en réalité pselafaó
«palpez moi
ou tâtez
moi » qui
permet de vérifier une réalité matérielle incontestable. Dans sa
première épître St Jean usera du même mot évocateur et fort
« ce que nos mains ont palpé,
du Verbe de vie… »
epseláfesan
(1 Jean 1 :1et s.). (« Ils disent « il est
ressuscité » Vittorio Messori Edition FX de Guibert page
98-2004).
34
Le déisme c’est l’athéisme masqué
des hésitants ou des timides. Je ne prétends pas que le Cardinal
soit déiste,
mais sa conception de l’Église correspond bien à celle d’un
Dieu sans nature définie, sans essence et où chacun peut projeter
ce qu’il en ressent.
35
Montaigne disait : « les
opinions les plus éthérées voisinent souvent avec les mœurs les
plus ténébreuses »
38
« Nous
sommes un certain nombre de personnes un peu partout dans le monde
qui avons appris à nous connaître… ».
Nous « connaître » ou nous « reconnaître » ?
39
Écoutons
Saint
François de Sales :
« Tout
est assuré en l'obéissance, tout est suspect hors
de l'obéissance.
Quand
Dieu jette des inspirations dans un cœur, la première qu'il répand
est celle de l'obéissance. Mais y eut-il jamais une plus illustre
et sensible inspiration que celle qui fut donnée au glorieux saint
Paul ? Or, le plus important de cette inspiration fut qu'il allât
en la cité, en laquelle il apprendrait par la bouche d'Ananias, ce
qu'il avait à faire ; et cet Ananias, homme grandement célèbre,
était évêque de Damas. Quiconque dit qu'il est inspiré et refuse
d'obéir aux supérieurs et suivre leur avis, il est un imposteur.
Tous les prophètes et prédicateurs qui ont été inspirés de
Dieu, ont toujours aimé l'Église, toujours adhéré à
sa doctrine, toujours aussi été approuvés par elle, et n'ont
jamais rien annoncé si fortement que cette vérité...
De
sortes que les missions extraordinaires sont des illusions
diaboliques, et non des inspirations célestes, si
elles ne sont reconnues et approuvées par les pasteurs
qui ont une mission ordinaire ». (VIII, 13).
40
Né à Gorcum
Pays Bas en 1541. Docteur en théologie le 22 novembre
1580. Il mourut à Douai, en odeur de
sainteté, le 20 septembre 1613. Ses
admirables travaux sur les saintes
Ecritures, ainsi que sur les quatre
livres des Sentences de Pierre Lombard
et sur la Somme théologique de saint Thomas d'Aquin, placent
Estius au premier rang des maîtres de
la science. Guillaume Estius était le
neveu de l'un des principaux martyrs de
Gorcum. Les dix-neuf
martyrs de Gorkum, canonisés le 29 juin 1867 par Pie IX,
appartiennent au martyrologe des
Pays-Bas pendant les guerres de
religion.
42
Constitution
Dogmatique Dei Verbum de Vatican II : « 9.
Le rapport réciproque entre la Tradition et l’Écriture : La
sainte Tradition et la Sainte Écriture sont donc reliées et
communiquent étroitement entre elles. Car toutes deux, jaillissant
de la même source divine, ne forment pour ainsi dire qu’un tout
et tendent à une même fin. En
effet,
la Sainte Écriture est la Parole de Dieu en tant que, sous
l’inspiration de l’Esprit divin, elle est consignée par écrit
; quant à la sainte Tradition, elle porte la Parole de Dieu,
confiée par le Christ Seigneur et par l’Esprit Saint aux Apôtres,
et la transmet intégralement à leurs successeurs, pour que,
illuminés par l’Esprit de vérité, en la prêchant, ils la
gardent, l’exposent et la répandent avec fidélité : il en
résulte que l’Église ne tire pas de la seule Écriture Sainte sa
certitude sur tous les points de la Révélation. C’est pourquoi
l’une et l’autre doivent être reçues et vénérées avec un
égal sentiment d’amour et de respect ».
45
Cette citation de l’Évangile de St
Jean est aussi le commencement de « L’Imitation de Jésus
Christ ».
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Bien que tout à fait appropriée
puisque la philosophie du « cogito » engendra un cortège
de philosophes idéalistes (au
sens philosophique de négateurs du
réel) qui ruina pour des siècles
le sens commun et le rapport de l’intelligence au monde concret.
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Dont les conséquences ne sont pas ce
que les livres d’école alarmistes nous en disent et qui eurent
aussi leur utilité en préservant entre autre la cohésion sociale
(comme on dit de nos jours).
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Parole redoutable mais qui demeure
inexpliquée, scellée dans son imprécision. Ce qui la rend
d’autant plus inquiétante, dérangeante et même menaçante.