mardi 1 janvier 2013

« Confession d’un Cardinal » Réfutation


« Confession d’un Cardinal » Réfutation :
« S’il y avait danger pour la foi, les supérieurs devraient être repris par les inférieurs, même en public. Aussi Paul, qui était soumis à Pierre, l’a-t-il repris pour cette raison » (St Thomas d’Aquin Somme théologique II II 33, a. 4).
J'ai cru c'est pourquoi j'ai parlé (2 Corinthiens: 4.13)
Apologie de l’Église Catholique
« Que personne ne vous abuse par de vains discours » (Éphésiens 5,6)
Le 26 mars 2011 j’assistai à une conférence sur le livre « Confession d’un Cardinal » donnée par l’auteur à quatre mains du livre éponyme, Olivier Legendre (Éditions JC Lattès 2008). La conférence eut lieu à l’abbaye Bénédictine de Belloc à proximité de Bayonne.
Le livre qui fut écrit de par la volonté du Cardinal X1 est la transcription des confidences, des réflexions, des anecdotes et de la vision doctrinale de celui-ci sur l’Église catholique, son histoire, son affaissement actuel et sa voie telle que le prélat l’entend pour le futur.
La lecture du livre m’ayant inspiré un profond malaise en raison des partis pris et des analyses injustes et réductrices sur l’histoire et la nature de l’Église, ce qui ne pouvait conduire qu’à des développements et des projections inexacts et même dangereux, je décidai d’intervenir durant le débat habituel de fin de conférence.
J’avais bien sûr l’intention de présenter mes objections, mes critiques afin que soit exposée une doctrine plus fidèle et plus respectueuse envers la Sainte Église catholique.
Très rapidement mon intervention, très courtoisement acceptée par Olivier Legendre, irrita le frère bénédictin qui organisait l’assemblée (j’avais remarqué sa mimique contrariée pendant mon intervention). Si bien qu’après quelques brèves minutes où je ne pus que commencer ma démonstration il me fit rendre le micro sous prétexte qu’on ne posait que des questions. Mes objections furent donc écourtées, sans urbanité, fermement, néanmoins sans incident. Bien entendu la majorité de l’assemblée m’était hostile car je troublais le consensus habituel autour du conférencier installé à sa chaire. L’Église du « dialogue », Oui, tant que sont échangées des opinions ; mais NON, quand est témoignée l’orthodoxie. Car alors nous entrons dans l’Église du silence.
Ce dénouement est sans doute un signe de la Providence car, alors que je n’y aurais jamais songé, j’ai résolu d’écrire ma réfutation, reprenant pour les développer les arguments que je me proposais de présenter.
Qu’il en soit fait selon ce que Dieu voudra.
















La crise de l’Église :
Le propos du Cardinal X est de constater la crise de l’Église, d’en déterminer les causes par l’Histoire, d’en privilégier une comme déterminante et de proposer une nouvelle voie de présence au monde, nullement nouvelle d’ailleurs nous le verrons2, mais surtout inadaptée, et pire. Car rien n’est pire que de douter de l’Église comme moyen de sanctification évangélique car c’est aussi douter de Jésus Christ qui ne fait qu’un avec elle.
Sur les manifestations de la crise il n’est pas nécessaire d’insister : crise des vocations, disparition de pans entiers des ordres religieux, effondrements des baptêmes, des mariages, des pratiques sacramentelles, de l’assistance à la messe, au catéchisme…L’analyse factuelle est cruelle mais nul ne la conteste.
Pour le Cardinal, la cause première et essentielle de cette crise réside dans l’histoire dévoyée de l’Église au cours des temps, depuis Constantin jusqu’à la perte des États pontificaux en 1870. Jusque là, Rome, en connivence avec les pouvoirs politiques, aurait sacrifié son message au maintien de sa puissance temporelle. Disons le tout de suite, c’est l’analyse archi ressassée des Francs maçons et anticléricaux depuis deux siècles, des modernistes, des marxistes, de tous les ennemis de l’Église qui caricaturent pour ruiner. Nous verrons ce qu’en penser.




L’histoire de l’Église, selon le Cardinal X :
« Nul ne peur avoir Dieu pour Père s’il n’a l’Église pour Mère » Saint Justin (†162/168 ?)
C’est à partir d’ici que commence la flagellation inique, déloyale et anachronique3 le l’Église par le narrateur, dans un survol de l’histoire ecclésiastique purement sociologique, humain et historiciste4 qui ne fait jamais allusion et donc ne recours jamais à la nature divine de l’Église fondée par Jésus Christ et animée par le Saint Esprit. Comme si TOUT ce qui était survenu au catholicisme depuis toujours n’était pas disposé par Dieu lui-même qui lui en fit la promesse d’indéfectibilité (« et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle » (St Matthieu 16 :18 ) et d’assistance « Et moi, je suis avec vous toujours jusqu'à la fin du monde.»(St Matthieu 28 :20). Si nous croyons avec confiance que Dieu choisit ou permet les évènements qui guident son Église, même les chutes morales et les accidents de l’histoire en vue du succès, non humain mais surnaturel de sa mission, nous ne pouvons plus regarder sa marche dans les siècles comme un sceptique désenchanté et réprobateur.
Au contraire, l’histoire sans surnaturel de l’Église s’écrit à travers un prisme mutilateur, simplificateur, unilatéral, une parodie d’histoire. Avec de surcroît quelques inexactitudes factuelles que j’ai du mal à croire accidentelles, provenant d’un Cardinal manifestement cultivé mais plus voltairien que thomiste.
L’Église, le Moyen Âge & les femmes :
  1. ainsi l’Église aurait partagé avec « les puissances temporelles » des « solidarités » parmi lesquelles « les femmes n’ont ni âme ni existence civile » (page 91). Fable anticléricale rabâchée et absurde, inconvenante surtout sur les lèvres d’un Cardinal qui ne peut ignorer le culte immémorial, fervent et universel de la Très Sainte Vierge Marie qualifiée de « Mère de Dieu » dès le concile d’Éphèse en 431 ; ne reconnaissait on alors pas qu’elle eût une âme ? et la très antique prière du canon romain5 « Nobis quoque peccatoribus » ne recourt elle pas à l’intercession des saintes Félicité, Perpétue, Agathe, Lucie, Agnès, Anastasie ? Ces saintes étaient donc au paradis, sans âme ? Qui peut croire qu’un culte était rendu à des êtres dépourvus d’âme ? L’Église n’a-t-elle pas canonisé Ste Catherine de Sienne († 1380) qui sermonna Grégoire XI, le Pape ! pour qu’il rentre enfin d’Avignon à Rome ; ce qu’il fit, obéissant en plein Moyen Âge à une femme (sans âme ?). L’abbaye, immense, de Fontevraud (fondée en 1101) avec des hommes et des femmes dans des bâtiments séparés vivant sous la règle d’inspiration bénédictine n’était elle pas dirigée exclusivement par une abbesse selon la règle du fondateur Robert d’Arbrissel ? une abbesse sans âme ?
Pas une seule épître de Saint Paul, où le salut final cite nommément des frères, qui n’exalte aussi, souvent, la mission de femmes dans les premières communautés : « Phébé la diaconesse » première citée au final de la grande épître aux Romains « Recevez la d’une manière digne des saints. Assistez-la en toute affaire. Elle est venue elle-même en aide à beaucoup de gens et à moi-même » puis « Marie qui s’est donnée beaucoup de mal pour vous » « la très chère Persis » « la mère de Rufus qui est aussi la mienne » (elle fut probablement l’épouse de Simon de Cyrène dont St Marc désigne les deux fils « Rufus & Alexandre » Mc 15,21) « Julie » ; « Priscille » (1 Corinthiens).


Aliénor d’Aquitaine, chef d’état à part entière, diplomate remarquable ne marqua-t- elle pas son siècle (1122-†1204), Blanche de Castille ne fut elle pas régente de France au XIII° siècle, et Isabelle la catholique Reine de Castille, puis d’Espagne au XV° ? Ste Jeanne d’Arc ne se vit elle pas confier une armée par le Roi en 1429 ? Et Jeanne Hachette en 1472 ne sauva t elle pas la France de l’invasion du Téméraire ? D’innombrables femmes au moyen-âge étaient médecin, apothicaires (voir les romans de Paul Doherty professeur d’histoire médiévale en Angleterre et sa saga en 7 tomes « contes de Cantorbéry de Katherine Swinbrooke » très documentée sur les mœurs et les coutumes d’alors).
Connivences temporelles ?
  1. Autre inexactitude récurrente dans l’examen historique du Cardinal : l’Église aurait cheminé tout au long avec les puissances temporelles, César puis les monarques avec une complicité coupable qui liait les deux pouvoirs. Image conventionnelle construite et forcée afin d’enterrer notre religion à la suite des trônes des rois. C’est l’histoire fabriquée pour nuire qu’endosse le prélat.
Certes il fallut cohabiter pendant des siècles avec les régimes contemporains de 2000 ans. Notons au passage, ce n’est pas insignifiant, que durant cette ère de vie commune les régimes passèrent, se succédèrent, sombrèrent, se contredirent dans leur expression politique (Empire romain, féodalité, monarchies, républiques, dictatures, Re empires, républiques parlementaires, présidentielles…), l’Église subsiste, non sans changer, mais substantiellement immuable dans son organisation hiérarchique, dans sa doctrine, dans son sacerdoce, dans ses sacrements. Il a donc été normal, coexistant avec le pouvoir temporel, d’entretenir des rapports constants avec lui : coexistence n’est pas compromission ; après tout l’Église fut toujours dans les états. Mais fut elle toujours et par principe avec les états6 ? Quelle méconnaissance de l’histoire de le prétendre et d’en tirer la cause de l’affaiblissement religieux actuel !
Dès l’empire romain converti, trop de Césars furent tentés de s’approprier le pouvoir religieux et nos papes durent lutter âprement, héroïquement pour maintenir la sphère religieuse hors du champ impérial. Le Césaropapisme des empereurs, fléau de l’antiquité chrétienne, s’exerça dès la crise arienne, puis nestorienne, puis iconoclaste et bien d’autres encore, les empereurs tentant d’imposer telle hérésie ou tel courtisan à un poste ecclésiastique à des papes dépourvus de moyens mais non de courage. Afin de ne pas surcharger ce texte d’exemples qui fourmillent7 on citera simplement l’excommunication de l’Empereur Anastase 1° par le pape Symmaque († 514) pour hérésie monophysite8. De fait, contrairement à la fausse opinion dénuée de fondement historique réel la conversion de Constantin, si elle fit cesser le martyre sanglant de masse, n’abolit pas la confrontation, ni la persécution9 ; le prétendu constantinisme10 de l’église est une invention intentionnelle pour la déconsidérer au mépris des faits.
Identiquement durant les temps jusqu’à la chute des monarchies, nulle connivence radicale mais une confrontation permanente. Qui ignore la longue lutte du Sacerdoce et de l’Empire qui se conclut, provisoirement, par l’humiliation de l’Empereur Henri à Canossa devant St Grégoire VII (1077). A-t-on oublié l’excommunication de Philippe Auguste, l’assassinat de l’archevêque de Cantorbéry Thomas Becket(1170) par le roi Henri II d’Angleterre, l’attentat d’Agnani provoqué par Philippe le Bel contre le Pape qui en mourut (8 septembre 1303), les interdits de Philippe II d’Espagne (toujours cité comme le type du roi catholique !) contre les brefs de Saint Pie V, la lutte de Louis XIV contre le Pape dans l’affaire de la Régale (où le roi procédait à une spoliation des évêchés et les maintenait délibérément vacants) puis la Déclaration des Quatre Articles gallicans et conciliaristes répondant aux intentions royales contre le Pape en 168211, le sac de Rome par l’Empereur (catholique) Charles Quint (mai 1527,20 000 victimes, des dommages incalculables dans la ville), le conflit de Pie VI avec l’empereur Joseph II d’Autriche qui prétendait régenter TOUTE la religion jusqu’au détail, les persécutions révolutionnaires qui virent Pie VI prisonnier, exilé dans des conditions lamentables, mort épuisé à Valence en France où il fut enterré à 82 ans, sans cérémonie religieuse dans une fosse commune.
Et pour conclure sur les « connivences avec les puissances » que dire de Napoléon prédateur du Saint Siège, geôlier du Pape Pie VII et qui alla jusqu’à lever la main sur lui à Fontainebleau12.
Non, la vie de l’Église au cours des temps ne fut pas un long fleuve tranquille et dompté bordé de fleurs.
Galilée13 :
Le Cardinal X attribue une grande influence à la décision de l’Église de condamner Galilée en 1633 ; il y voit une preuve de rupture grave avec l’esprit scientifique moderne l’amenant à justifier le divorce du monde moderne avec l’Église (elle s’est trompée sur ce sujet, donc elle se trompera encore, et elle discrédite ainsi son autorité qui a perdu le sacré). Bien que de nombreux historiens aient remis les choses à l’endroit sur ce sujet et restitué la vérité il sera utile de solder aussi ce réquisitoire récurrent contre l’Église :
« La gloire de Galilée repose surtout sur des découvertes qu’il n’a jamais faites et sur des exploits qu’il n’a jamais accomplis. Contrairement aux affirmations de nombreux manuels, même récents, d’histoire des sciences, Galilée n’a pas inventé le télescope. Ni le microscope. Ni le thermomètre. Ni l’horloge à balancier. Il n’a pas découvert la loi d’inertie ; ni les taches du soleil. Il n’a apporté aucune contribution à l’astronomie théorique. Il n’a pas laissé tomber de poids du haut de la tour de Pise ; et il n’a pas démontré la vérité du système de Copernic. Il n’a pas été torturé par l’Inquisition ni excommunié, il n’a pas dit « Eppur si muove » (et pourtant elle tourne) ; il n’a pas été un martyr de la science. » Arthur Koestler (Les somnambules, 196314) ; Koestler qui était Juif et non catholique, communiste puis anti communiste, esprit libre et errant ne peut être soupçonné, en l’occurrence, de parti pris.

On nous présente habituellement Galilée comme un génial héros de la science, persécuté par l’obscurantisme (l’Église) mais, en vérité, la correspondance et les ouvrages de Galilée témoignent objectivement d’un esprit frondeur et orgueilleux, souvent éloigné du véritable esprit scientifique.
Galilée s’attribua la découverte des taches solaires. Or ces taches avaient été observées à l’œil nu dès le IVe siècle av. J.-C., et à la lunette par Scheiner en 1611, soit deux ans avant Galilée. Au père Grassi qui s’insurgeait contre cette falsification, il n’hésita pas à écrire : « Vous n’y pouvez rien, Monsieur Grassi, il a été donné à moi seul de découvrir tous les nouveaux phénomènes du ciel et rien aux autres. Telle est la vérité que ni la malice ni l’envie ne peuvent étouffer » (Il Saggiatore). D’ailleurs avec le Dialogue (1632), il régla définitivement leur compte à ses adversaires : « ceux-ci sont des pygmées mentaux », des « idiots stupides », « à peine dignes du nom d’êtres humains » !
Il construisit une théorie des marées complètement erronée, le pape Urbain VIII, qui estimait Galilée, ne souhaite pas qu’il fasse figurer dans son livre des arguments aussi peu convaincants. L’entêté Galilée ne tiendra pas compte de cet avis.
Le théologien et évêque Caramuel, s’interrogeant sur la conduite à suivre si une preuve était fournie en faveur du mouvement de la terre, s’exprime ainsi en 1651 : « Si cela se produit, les cardinaux permettront simplement d’expliquer les paroles du chapitre X de Josué comme des expressions métaphoriques. » (Épisode de l’arrêt de la course du soleil).
Tous les témoignages des théologiens de l’époque montrent bien que les décrets de condamnation de 1616 et 1633 furent bien pris comme des décrets disciplinaires. En publiant un décret disciplinaire, le Saint-Office n’a donc pas clos la question, mais a montré qu’il ne pouvait pas cautionner la témérité d’un homme qui voulait imposer une simple hypothèse scientifique, et réinterpréter l’Écriture Sainte en fonction de cette hypothèse.
Quant aux prétendues persécutions dont aurait pâti Galilée, en voici le récit : Dès son arrivée à Rome pour le procès, Galilée bénéficie de conditions matérielles confortables et demeure chez son ami Niccolini à l’ambassade de Toscane, alors qu’il aurait dû séjourner dans une prison du Saint-Office comme tout accusé. Il est autorisé à faire réciter les psaumes de la pénitence par sa fille, religieuse carmélite. Il n’ira jamais en prison, car Urbain VIII lui permet de retourner dans le palais de Niccolini, puis à Sienne dans celui de l’archevêque Piccolimini, autre ami dévoué. A la fin de 1633, Galilée obtient la permission de se retirer dans sa villa d’Arcetri, près de Florence. Il y passe les dernières années de sa vie, très entouré, recevant ses disciples et ses amis, et continuant ses travaux de mathématiques jusqu’à sa mort en 1642.
La condamnation du livre de Galilée Dialogue et des ouvrages enseignant le système de Copernic a été levée en 1757, après plus de 100 ans d’interdiction. Mais les décrets n’empêchaient pas de continuer les observations du ciel et chercher des preuves solides en faveur du mouvement de la terre. Les travaux en astronomie n’en ont pas été enrayés pour autant : preuve en est le nombre d’ouvrages publiés après 1633 par les plus illustres astronomes : Leibniz, Halley, Newton… Loin d’être néfastes, les décrets contre Galilée obligèrent les savants à appuyer leurs théories sur de meilleures observations ou vérifications. Paradoxalement, la science devait y gagner.
Finalement, la querelle à laquelle Galilée prit part ne doit nous apparaître ni plus ni moins qu’une simple étape dans l’édification de l’astronomie moderne. L’Église y est intervenue contrainte et forcée, dès lors que le débat avait dévié vers l’exégèse, ce qui la concernait en propre. Elle a même rendu service à la science de son temps en calmant les esprits et en rappelant à un savant la véritable attitude scientifique : ne parler que par hypothèse si la théorie n’est pas suffisamment prouvée par l’expérience. Cependant le caractère ombrageux et emporté de Galilée l’avait amené à l’excès vers des propositions, en partie vraies mais témérairement catégoriques, bien que sans preuves, et à étendre celles-ci au domaine de l’exégèse biblique qui dépassait sa compétence et la légitimité de sa démarche.












Le bienheureux PIE IX :
  1. Mais c’est à mon sens dans la narration purement naturaliste et politique de l’histoire des conclaves récents ou de la proclamation de l’infaillibilité du Pape par la Constitution « Pastor Æternus »(1870) que se manifeste la totale carence de perspective de la grâce dans la vie de l’Église de la part du Cardinal X. Dans ces deux évènements narratifs n’entrent en scène que des circonstances humaines contingentes, des rapports de force de type parlementaire ou géopolitiques. Nous lisons ici des récits sans spiritualité, strictement humains, dépourvus du respect et de la piété qu’un catholique devrait avoir pour ces évènements jalons de la vie ecclésiale. Le conclave n’est qu’une assemblée de sénateurs âgés qui votent selon des critères géographiques, sentimentaux, sous influences d’écoles diverses ou de mimétisme momentané et obéissants à un jeu parlementaire banal. Nulle trace de l’action du Saint Esprit qui est pourtant toujours l’auteur d’une « création nouvelle ». D’ailleurs qui est ce Divin Acteur pour lequel le Cardinal écrit « Nous autres catholiques, nous pensons que ce que nous appelons l’Esprit Saint est au travail au sein de notre Église » (page 113). Quelle manière de parler de la Troisième Personne de l’Auguste Trinité de façon irrévérencieuse, « ce que nous appelons », car il ne dit pas « Celui que nous appelons » qui fait référence à une personne mais « ce » qui qualifie un indéterminé. C’est que le Saint Esprit est en effet bien absent de l’Église qui comparait sous la critique du prélat.
La proclamation de l’infaillibilité de son côté n’est pour lui que le cadeau compensatoire des pères conciliaires fait à l’irritable père fouettard Pie IX (le Bienheureux Pie IX !) afin de le dédommager de la perte des états pontificaux (page 235) ; en somme le cadeau inverse de Judas ! Celui ci avait obtenu 30 deniers pour perdre l’auteur de la Grâce, celui là obtient la Grâce de la vérité pour compenser la perte de trente deniers !
Quelle méconnaissance ou quel refus de considérer l’enchainement VRAI des évènements du concile Vatican I  qui anéantit le prétendu troc sans dignité d’un pouvoir temporel contre un pouvoir spirituel15 . Car Bhx Pie IX évoqua la convocation du concile le 6 décembre 1864, proclama en public son intention le 28 juin 1867 et le convoqua le 28 juin 1868. Les États Pontificaux, excepté Rome étaient perdus depuis le 18 septembre 1860, annexés par le Piémont du Roi anticlérical Victor Emmanuel et du premier ministre Franc maçon Cavour.
Or, Dans la bulle de convocation16 du concile Æterni Patris le programme fixé par Pie IX à celui-ci est : défense de la foi contre les erreurs du temps, mise à jour des canons du concile de Trente. RIEN sur l’infaillibilité !
C’est à l’initiative de plus de 400 évêques (sur ± 700 présents au concile à ce moment là) qu’en janvier 1870 une pétition demande la mise à l’ordre du jour de la question de l’infaillibilité. 136 évêques signent une pétition en sens contraire.
Les débats théologiques durèrent jusqu’au 18 juillet 1870 où le vote eut lieu ; 55 membres de la minorité (et non 140 comme le dit le Cardinal !17) préférèrent quitter le concile plutôt que de voter contre la Constitution, 535 Pères votèrent OUI et 2 NON18. Dès que le Pape eût ratifié la Constitution les 2 opposants et ceux qui s’étaient abstenus (les 55 qui avaient quitté l’aula) se rallièrent au texte19.
Rome fut envahie par le Piémont le 20 septembre 1870 ce qui mit fin au Concile. Il n’y eut donc AUCUNE intention ni de la part du Pape ni de celle des évêques d’échanger un pouvoir contre un autre, rien dans les débats ni dans les préparatifs du concile ne présente cette hypothèse mercantile qui ravale une décision doctrinale au niveau d’un marché sordide et vénal. Que n’entendrait on pas si on prêtait au concile Vatican II des coulisses d’aussi bas étage ! Car l’alternative est : le Saint Esprit assiste le concile ou ne l’assiste pas. Mais le Saint Esprit est un grand absent des confessions cardinalices. D’ailleurs, ce qui dément péremptoirement la thèse du Cardinal X c’est que Pie IX qui régna encore huit ans après la définition de l’infaillibilité ne l’utilisa jamais ! C’est donc une conception et la peinture d’une Église étriquée, méprisable & purement humaine que nous livre le Cardinal X.
Selon lui le Pape Pie IX aurait transposé « son enfermement physique » dans son « attitude psychologique » (page 235) ; manifeste erreur (?) chronologique du cardinal puisque « l’enfermement » dans Rome se fit fin septembre 1870, alors que les grandes décisions doctrinales du Pape étaient très largement antérieures : 1854 proclamation de l’Immaculée Conception, 1864 encyclique Quanta Cura et Syllabus des erreurs condamnées (entre autres libéralisme, matérialisme, rationalisme, positivisme, relativisme qui déferlent alors sur l’Europe et annoncent les cataclysmes européens du XX° siècle car les idées fausses se muent facilement en pratiques inhumaines ).
C’est aussi omettre de dire que Pie IX fut élu car Libéral (on sortait du règne de Grégoire XVI qui avait condamné la liberté de conscience telle que définie par Lamennais20, « un délire », dans l’encyclique Mirari vos 183221). Sitôt élu il décréta une amnistie générale, publie une constitution à deux chambres, institue la liberté de la presse (inexistante dans les états européens), crée un conseil consultatif des désirs du peuple, la Consulta, fait construire des chemins de fer et réseaux télégraphiques et restaure l’éclairage public. Tout l’inverse de l’image chagrine et recroquevillée sur le passé donnée par la Cardinal X. L’assassinat par les révolutionnaires italiens ennemis de l’Église du chef de gouvernement pontifical Pellegrino Rossi et l’insurrection à Rome où est proclamée la République romaine obligent le Pape libéral à fuir. Il reviendra à Rome en avril 1850 avec les yeux ouverts sur la nature des idées révolutionnaires : il en sortira une monumentale œuvre doctrinale. Si l’on a quelque lumières de foi sur la vie de l’Église on ne pourra s’empêcher de reconnaître que son pontificat de 31 ans, le plus long de l’histoire, ne peut pas RIEN DEVOIR à la volonté ou la permission de Dieu sur son Église ; car tout expliquer de Pie IX et de Vatican I par des circonstances seulement humaines, viles de surcroît, consiste à rester aveugle et sourd devant la Providence qui conduit et assiste l’Église dans les siècles.
Les États Pontificaux, pourquoi ?
Je le dis ici hardiment, le Cardinal n’a rien compris ou rien voulu comprendre à la raison d’être des États Pontificaux durant 11 siècles. ONZE Siècles pendant lesquels le Saint Esprit âme de l’Église et Jésus Christ sa Tête laissèrent délibérément errer leur Épouse !
L’Empire romain éteint, le monde européen entre dans le chaos politique et social de la féodalité faute d’État central unificateur. Dans un régime féodal au pouvoir éclaté, anarchique, violent et encore barbare, la seule garantie contre les prédateurs environnants et d’indépendance de ses décisions est la possession d’un territoire protégé. Le Patrimoine c’est la liberté. Le Pontife romain fut libre – et encore, relativement- parce que son État le préservait des tentations féodales puis royales d’usurper son pouvoir spirituel.
Si Dieu permit en 1870 la perte du pouvoir temporel, humiliation crucifiante pour les catholiques d’alors et pour le Pape lui-même, c’est sans doute d’abord afin d’éprouver le Siège Apostolique : « Ne soyez plus dans cette erreur que les choses pénibles à la nature ne sont que des châtiments de Dieu. Elles sont nécessaires aux gens de bien, pour augmenter leurs mérites et les faire croître en vertu » (« Méditations ascétiques » du Père de Dreux OFM). Mais aussi Dieu savait mieux que les hommes d’alors vers quel monde nous allions à la fin du XIX° siècle, un monde de fer où deux guerres mondiales et des idéologies totalitaires implacables aux âmes seraient fatales à de puissantes nations, produiraient près de 200 millions de morts et déplacerait les centres de pouvoir vers d’autres horizons.
Désormais, dans un univers où la nation, l’aire géographique ou l’État ne sont plus protecteurs, l’État Pontifical n’a plus de raison d’être ; le pouvoir spirituel suffit, Dieu aidant.
Dieu le savait, Il écrit droit avec des lignes courbes. Transcendant l’Histoire il anticipe les besoins du futur pour son Église. Celui qui lit l’histoire du catholicisme en ne considérant qu’un seul versant, sociologique, coiffé de lunettes déformantes et retranchant l’éclairage surnaturel mutilera inévitablement –et défigurera- cette histoire. On n’aura plus alors qu’une pauvre histoire humaine qui n’expliquera jamais comment avec tant de défauts et ses travers indéniables l’institution dure depuis 2000 ans, intacte substantiellement et inchangée. Durant l’âpre négociation du concordat, Napoléon excédé par la résistance du cardinal Consalvi que Pie VII avait envoyé à cet effet, le menaça ainsi : « Votre Église, je la détruirai et j’en bâtirai une autre ». Le courageux Secrétaire d’État du Saint Siège lui répondit : « Sire ce que de mauvais prêtres, de mauvais évêques, de mauvais cardinaux et de mauvais Papes n’ont pu faire tout au long des âges, vous ne le réussirez pas non plus ! »22
Oui, l’Église est Sainte avec des membres pécheurs ; bien sûr on peut ne voir que les pécheurs mais on ne voit pas ainsi qui est l’Église et de la sorte on perd l’Espérance et avec elle l’intelligence des faits.


Les bienfaits catholiques :
Car pas une seule fois dans son survol de l’histoire ecclésiastique le Cardinal X n’évoque les bienfaits spirituels et sociaux de l’Église durant les siècles. Dans sa braderie iconoclaste il oubli l’immense rôle qu’elle joua pour subvenir à la lacune de TOUS les états européens : elle créa et géra les hôpitaux (les lazarets) les écoles, les Universités (la plus prestigieuse : la Sorbonne), les refuges et soupes pour indigents ; elle institua et fit respecter les Trêves de Dieu pour limiter les guerres, civiles et autres, elle créa des asiles pour enfants abandonnés, elle imposa le repos hebdomadaire du dimanche (que la république est en train de supprimer), le repos des fêtes chômées, elle inventa le droit d’Asile, elle sauva et transmis le savoir grec et latin par les monastères, elle fut un foyer rayonnant d’art pictural, musical, poétique, de sculpture, d’architecture. L’Église fut la première à condamner l’esclavage (Bulle Sublimis Deus de Paul III, du 29 mai 1537, qui interdit l'esclavage des Indiens d'Amérique, 17 ans après la conquête du Mexique !), à protéger les Juifs persécutés (on disait alors « heureux comme un juif à Rome »). Elle fonda des ordres religieux pour adoucir les conditions des prisonniers, des galériens, pour racheter les esclaves capturés par les barbaresques en Afrique du Nord (des dizaines de millier). Elle créa des ordres religieux mendiants car elle est riche de ses pauvres, des ordres prêcheurs pour évangéliser les faibles, les hérétiques, les puissants, toujours frivoles et incrédules, des ordres contemplatifs priant pour ceux qui ne prient pas et rachetant le monde par leur ascèse perpétuelle. Elle se réforma elle-même par des papes et des conciles conscients des besoins des temps.
Des livres entiers furent écrits pour expliquer cela mais notre cardinal n’en dit mot. Pourquoi la face lumineuse de notre Église est elle ainsi occultée, oubliée, ensevelie, parfois flétrie ? Par un Cardinal !
C’est que cette Histoire dont il fait la cause de la crise des temps présents pour notre Église EXIGE d’être bien sinistre, bien imparfaite et bien stérile pour expliquer ses choix et options d’une autre Église qui humanise et soit invisible pour retrouver l’Évangile. Nous avons ainsi défini vers quelle alternative nous dirige le prélat qui, on le verra, n’est ni originale, ni nouvelle, ni féconde, ni hélas très catholique. C’est parce que son analyse de l’histoire commande toute sa démarche que j’ai pris soin de contrebattre méticuleusement sa présentation captieuse des faits.


Les « solutions » du Cardinal X.
« Luther et les siens ont désespéré de l'Eglise, et qui désespère de l'Eglise, c'est curieux, risque tôt ou tard de désespérer de l'homme… on ne réforme l'Eglise visible qu'en souffrant pour l'Eglise invisible. On ne réforme les vices de l'Eglise qu'en prodiguant l'exemple de ses vertus les plus héroïques… L'Eglise n'a pas besoin de réformateurs, mais de saints. » Bernanos (dans son texte « Frère Martin »)
« Les hommes doivent être changés par la religion et non la religion par les hommes. » Gilles de Viterbe, général des Augustins discours d’ouverture du concile de Latran 3 mai 1512.


Parvenus au terme de la copieuse première partie historique des « Confessions d’un Cardinal » nous entrons par le détour du récit du génocide Rwandais dans le dessein subtil du narrateur qui conduit son lecteur avec habileté vers le but qu’il s’est fixé et vers lequel il chemine avec la séduction d’un brillant esprit : nous convaincre de changer l’Église. Le signataire du livre, Olivier Legendre, qui partage manifestement les intentions du cardinal, l’accompagne avec connivence et compétence dans le dévoilement de sa pensée, l’obligeant parfois à la préciser et à aller au terme de ses conséquences. C’est son rôle de révélateur (au sens photographique) et il le remplit avec d’autant plus d’aptitude que le cardinal a bien reconnu en lui l’écho de ses idées.
Leçons du Rwanda :
Comment un pays africain aussi christianisé, avec une Église catholique bien structurée, une hiérarchie solide, des statistiques religieuses flatteuses (baptêmes, catéchismes, pratique religieuse, mariages religieux, tous ces indices abondants et ancrés) a-t-il pu soudain, instantanément, sombrer dans la pure barbarie intégrale, oublieux de sa marque chrétienne au point de se ruer dans l’assassinat de masse sanglant et bestial de ses propres compatriotes et voisins ? (le meurtre de masse fut accompli à la machette! un million de morts en environ trois mois).
La question du Cardinal est légitime, elle est fondée, elle nous interpelle, elle nous scandalise, elle appelle forcément une réflexion et si possible, une réponse.
Le récit du Cardinal est émouvant et même poignant, sa sœur, religieuse au Rwanda lui a fait ressentir en lui-même ces évènements dramatiques et insupportables, révoltants.
Bien sûr sa réponse à ce qui est un scandale est une réponse possible. Elle est même spontanément naturelle : l’Église là-bas a été incapable de transformer assez les hommes en chrétiens afin de rendre impossible l’inconcevable retour à la férocité bestiale. Donc l’Église, qui a failli, doit être changée avec son message : elle doit désormais « HUMANISER LE MONDE QUI NOUS ENTOURE », « créer un peu d’HUMANITÉ autour de nous » (page 205).
Je crains que la légitime émotion rwandaise ait égaré la clé de l’histoire de l’homme et de l’humanité dans l’esprit du Cardinal. Cette clé, sans laquelle RIEN de l’histoire de l’homme et de ses souffrances et de ses péchés ne se comprend, c’est le péché originel23. Certes le baptême le guérit, mais non sa cicatrice et ses effets sur notre nature. Pour réprimer les conséquences de ce péché il y faut le recours constants aux trésors de grâce dispensée par l’Église seule. Ainsi l’a voulu Dieu.
Car la concupiscence qui est la conséquence du péché d’Adam nous est transmise avec son cortège de passions qu’énumère St Paul dans l’Épître aux Galates (5 :19 à 21) : « Or on sait bien tout ce que produit la chair : fornication, impureté, débauche, idolâtrie, magie, haines, discorde, jalousie, emportements, disputes, dissensions, scissions, sentiments d'envie, orgies, ripailles et choses semblables - et je vous préviens, comme je l'ai déjà fait, que ceux qui commettent ces fautes-là n'hériteront pas du Royaume de Dieu. »
Ce n’est donc pas en humanisant le monde qu’on le libèrera de ses affreux démons intérieurs, de ses pulsions meurtrières et suicidaires, de ses sauvageries collectives et démentes qui abolissent la raison et enfouissent la foi, c’est en le divinisant, en le sanctifiant par la conversion soutenus par la grâce des sacrements et la pratique assidue, persévérante et enracinée des vertus chrétiennes, conversion toujours à reprendre, à soutenir, à renouveler.
Le Père qui a créé les hommes a dû nous envoyer le Fils pour faire les chrétiens et le Fils nous a envoyé le Saint Esprit qui fait les saints. Humaniser le monde c’est remonter l’histoire et effacer les bienfaits de notre religion, insuffisants parfois on le sait bien, mais sans lesquels l’humanité régresserait à l’inhumain ; car « là où il y a homme il y a hommerie » (Montaigne). C’est plus de Jésus Christ, plus de Saint Esprit, donc plus d’Église qui en est le Corps mystique qu’il faut à l’humanité. Or le Cardinal nous propose l’inverse, fausse solution à un vrai drame, il nous entraine vers la fusion de l’Église dans le monde, sa disparition par imprégnation aux valeurs humaines. Mais les valeurs humaines24 sont incapables d’élever l’homme au dessus de sa condition, l’homme de la Chute.
C’est en redevenant homme, en se replongeant dans sa concupiscence humaine, par un retour brutal de son animalité tenue en bride par la grâce ou de son violent orgueil déchainé que l’homme perd toute retenue et s’abîme dans la démesure sauvage.
« Sans moi vous ne pouvez rien faire » (St Jean 15-5) « Je peux tout par celui qui me fortifie (St Paul Phil. 4-13)
Si, comme nous devons le croire, Jésus est l’Église selon la forte parole de Ste Jeanne d’Arc « m’est avis que c’est tout un de Jésus Christ et de son Église » (parole rappelée dans le Catéchisme de l’Église Catholique du Bienheureux Jean Paul II avec cette autre : « Là où est le Christ Jésus, là est l’Église Catholique " (S. Ignace d’Antioche, Smyrn. 8, 2) c’est à elle qu’il faut revenir car ce n’est pas elle qui a fauté au Rwanda c’est l’homme qui a rechuté. L’homme revenant à sa nature –blessée et imparfaite- faute de la grâce –dispensée par l’Église- retourne à la cruauté ; humaniser c’est retomber ! (Voir in fine un exemple d’humanisation : exposition Piss Christ).
Faire accomplir à l’Église cette mutation missionnaire d’humaniser au lieu d’Évangéliser, lui faire enseigner et propager les valeurs humaines au lieu des Commandements de Dieu, des Béatitudes et du précepte de perfection (« soyez parfaits…) c’est changer l’injonction du Seigneur en la soldant pour un message terrestre : « Allez dans le monde entier, et prêchez l'Evangile à toute créature. Celui qui croira et qui sera baptisé, sera sauvé; mais celui qui ne croira pas sera condamné» (St Marc 16 :15-16) « Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, et leur enseignant à observer tout ce que Je vous ai commandé. Et voici que Je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la consommation des siècles. » (St Matthieu 28 :19-20).
Humanæ Vitæ :


« Juda dit donc à Onan, son second fils: Epouse la femme de ton frère et vis avec elle, afin que tu suscites des enfants à ton frère.
Onan, voyant la femme de son frère, et sachant que les enfants qui naîtraient d'elle ne seraient pas à lui, empêchait qu'elle ne devînt mère, de peur que ses enfants ne portassent le nom de son frère.
C'est pourquoi le Seigneur le frappa de mort, parce qu'il faisait une chose détestable. » (Genèse 38,8-10).


Cohérent avec cette volonté d’humaniser au lieu de sanctifier le Cardinal sonne une charge irascible contre la grande encyclique du Pape Paul VI Humanæ Vitæ (25 juillet 1968) qui selon lui, plus que les conséquences de Vatican II, a désertifié l’Église de ses fidèles refusant la doctrine du Pape sur la régulation des naissances25. En effet dans cette encyclique très doctrinale, rappelant une constante de l’enseignement du Magistère depuis toujours en matière de morale sexuelle, s’appuyant sur des données fortement argumentées Paul VI réprouve, comme ses prédécesseurs26 et comme le feront aussi vigoureusement ses successeurs, les moyens artificiels de contrarier les conséquences de l’acte sexuel. Le Pape ne méconnait pas les difficultés et les exigences du comportement naturel vertueux mais il sait qu’il est possible car « Dieu ne commande jamais l’impossible, mais en commandant il dit de faire ce que nous pouvons, de demander ce que nous ne pouvons pas, et il nous aide pour que nous le puissions » (Concile de Trente). Dans son texte Paul VI écrit : «  il n'est pas permis, même pour de très graves raisons, de faire le mal afin qu'il en résulte un bien , c'est-à-dire de prendre comme objet d'un acte positif de volonté ce qui est intrinsèquement un désordre et, par conséquent, une chose indigne de la personne humaine, même avec l'intention de sauvegarder ou de promouvoir des biens individuels, familiaux ou sociaux. C'est donc une erreur de penser qu'un acte conjugal rendu volontairement infécond et, par conséquent, intrinsèquement déshonnête, puisse être rendu honnête par l'ensemble d'une vie conjugale féconde ». Et il termine son encyclique ainsi, s’adressant aux évêques (et cardinaux !) : « Ne diminuer en rien la salutaire doctrine du Christ est une forme éminente de charité envers les âmes….Considérez cette mission comme l'une de vos plus urgentes responsabilités dans le temps présent puisque l'homme ne peut trouver le vrai bonheur, auquel il aspire de tout son être, que dans le respect des lois inscrites par Dieu dans sa nature et qu'il doit observer avec intelligence et amour. »
Certes, comme toujours en la matière, l’Église ne choisit pas la facilité, la démagogie, elle ne flatte pas l’homme, elle ne va pas dans le sens de la pente, elle est toujours fidèle à son fondateur, sa Tête, son Époux qui est monté à la Croix car il a « rendu témoignage à la vérité ». St Paul écrivit aux Galates : «Si je plaisais encore aux hommes, je ne serais pas serviteur du Christ. » (Gal.1 :10).
L’Église n’a pas été fondée pour humaniser mais pour diviniser. C’est un grand écart avec la subtile obsession du Cardinal. L’humanité en veut à l’Église romaine pour cette vérité, cette générosité qui lui est demandée, cette noblesse de comportement qu’elle appelle ; l’humanité dévoile de la sorte la lourdeur charnelle de ses choix. N’oublions jamais que le monde ne rejette pas seulement l’enseignement d’ Humanæ Vitæ, ce qu’il rejette c’est la CROIX et les vertus chrétiennes exigeantes et sublimes. Le monde ne se contentera pas de l’abandon de cette obligation demandée par l’Église (et du reste conforme à la loi naturelle) il réclamera ensuite le renoncement à tout ce qui s’oppose à ses désirs et plaisirs. Pour satisfaire ses convoitises l’Église ne serait jamais assez riche.
Mais la loi du Créateur est faite pour le bonheur non pour le plaisir. Un jour viendra où le jour ne venant plus, viendra « la Lumière qui éclaire tout homme » et tous comprendrons la sagesse de notre Mère.
L’humanisation n’est qu’une ambition maçonnique à la base de tous les projets destinés à écarter, de fait, l’Église et le catholicisme de toute influence sur la société ; c’est une arme pour chasser la mission évangélisatrice qui fut toujours d’apporter aux hommes Jésus Christ et sa Croix, pour leur salut. L’humanisation qui est sans cesse présentée comme un progrès est donc l’opposé de la christianisation. Charles Péguy l’avait bien vu quand il disait : « il n’y a que deux religions, la religion du progrès et la religion du salut ».
« Une autre église, invisible » :
Avant d’appliquer ce qu’on doit bien appeler le programme d’une Église autre, invisible( page 409), le Cardinal la définit comme portant «la tendresse que ressent Dieu pour chacun des hommes » ; il répète à plusieurs reprises cette formule de la même façon (pages 312,314,350, 351 2 fois) ce qui indique qu’il l’a longuement mûrie et qu’elle énonce vraiment le contenu de cette « Église  invisible » (page 409, en fin de livre, donc aboutissement terminal de sa longue démonstration).Il s’exprime ainsi : « nous avons l’intime conviction d’être en train de proposer de nouveaux modèles d’être réellement chrétiens…Et nous savons, je le répète, que le temps travaille pour nous. »(Page 410).s
Tout ceci mérite d’être « compté, pesé, divisé » (Daniel 5 :25)27 afin de confronter ce qui se révèle ainsi comme un plan avec le plan du Seigneur Jésus dont il a confié la mise en œuvre à ses Apôtres.
Faute d’une explicitation plus claire le « nouveau modèle d’être réellement chrétien » c’est donc de partager « la tendresse que ressent Dieu pour chacun des hommes », programme affectif mais réducteur, au contour imprécis et ouvert à toutes formes de réalisation, sans obligations précises, théâtral mais finalement laissant à chacun sa subjectivité pour agir selon sa propre manière d’entendre le précepte. Voilà donc un credo minimal, plus petit commun multiple d’un vague élan subjectif séduisant mais anémié, un credo de pygmée à article unique. Car comment se manifeste cette « tendresse » sans le don de la Croix, jamais évoqué ; et qui est ce Dieu, quels sont son visage, ses qualités, sa nature, la portée et le prix de son Amour ? Plutôt que « tendre » ne serai ce pas un Dieu « mou » ? Qui, indéfini plutôt qu’infini permet tout, supporte tout et ne réprouve rien.
Et bien je dis au Cardinal que son nouveau modèle va se disperser en une infinité de modes de penser et de faire et ce « nouveau modèle » se dissipera en une profusion de chapelles qui prétendrons chacune détenir le bon mode d’emploi. C’est ainsi que dix ans plus tard avaient déjà subi la dispersion de doctrine, de foi, de pratiques et de cultes les confessions luthériennes nées du même Réformateur. Et encore celui-ci avait-il formalisé sa doctrine autre que catholique en 95 thèses dites « de Wittenberg »où il résumait sa Réforme. Réformer l’Église est une présomption, sans doute aussi un orgueil, qui n’est pas accessible à tous et que nul n’a jamais réussi s’il n’était Saint c'est-à-dire d’abord soumis à l’Église sa Mère. Proposer une aussi indigente ligne de conduite qu’appliquer «la tendresse que ressent Dieu pour chacun des hommes » avec, en plus, « une Église invisible » ne craignons pas de le dire est déjà voué à l’échec. Car faire un Église invisible c’est sortir de l’Église visible qu’a fondée Jésus Christ.
Le Seigneur a voulu une Église visible, d’emblée il l’a établi hiérarchique avec Pierre à la tête et comme fondement après son propre départ, doté de la promesse de l’indéfectibilité. Avec les Apôtres comme détenteurs des pouvoirs de lier et délier, de remettre les péchés, de dispenser la grâce…C’est si vrai que dès la perte de Judas le collège apostolique procède à son remplacement immédiat par Matthias qui est sacré « évêque » ainsi que nous appelons aujourd’hui les successeurs des Apôtres. Le ministère visible ne souffre aucune vacance.
Saint Paul est il sitôt terrassé par la Lumière du Christ vers Damas que Jésus en personne l’envoie vers un homme de son Église, un « ancien28 » Ananie, pour être guéri29, instruit et baptisé ; Dieu veut que sa grâce s’écoule par le canal des hommes pécheurs, par une médiation visible, donc une église visible de pécheurs afin de ne pas décourager les pécheurs d’y entrer. Une Église de Parfaits ou d’Anges sans fautes aurait chassé les misérables déchus que nous sommes, incertains d’être compris et pardonnés au tribunal de la pénitence et de la miséricorde. Dieu transmet la grâce parfaite par des hommes imparfaits, les moyens divins de sanctification passent par les mains déficientes des hommes car Dieu a encore confié « à l’Église et à des personnes son autorité et ses lumières pour nous diriger »30 . La considération de notre faiblesse et de notre infirmité et de nos chutes est destinée à montrer qu’a travers notre canal déficient c’est bien Lui, le Seigneur qui agit efficacement31. C’est pourquoi déprécier l’Église est une faute contre Dieu en personne.
Une Église invisible est-ce une Église sans dogmes, sans culte organisé, sans sacrements, sans hiérarchie et sans sacerdoce ? C’est bien en effet ce que pense le cardinal. Il n’est pas ému par la disparition des prêtres, voici ce qu’il en dit : « l’écho d’un réflexe solidement ancré consiste à penser que s’il n’y a plus de prêtres il n’y aura plus d’Église, parce que c’est ainsi que nous avons fonctionné depuis des siècles : là où était le prêtre, là était l’Église….D’une part l’Église n’a pas toujours fonctionné comme cela, et d’autre part nous pouvons parfaitement et légitimement inventer d’autres manières de nous comporter »(Page 385). Terrible analyse qui consent de fait à la disparition de l’Église.
Car pas de prêtres, pas de sacrements ; pas de sacrements, pas de grâce, pas de pardon, pas de nourriture super substantielle, pas d’unité de foi mais un éparpillement de croyances et de cultes foisonnants et dégradés. Le Cardinal croit il que faute d’Église visible Dieu va inspirer directement à chaque homme l’interprétation correcte des livres saints ? Comme le pensait Luther32. Le saint Curé d’Ars disait « quand il n’y aura plus de prêtres, on adorera les bêtes ».
Mais là encore le cardinal X est dans son tort car JAMAIS l’Église n’a «  fonctionné comme cela ». Il suffit de relire les premiers chapitres des « Actes des Apôtres » c'est-à-dire l’histoire (inspirée) de l’Église qui suit immédiatement l’Ascension du Seigneur et nous y verrons la consolidation de la Hiérarchie (élection et ordination de St Matthias comme Apôtre pour remplacer Judas Act.1 :22-26) et son organisation structurée (Act. 6 :2-6), la confirmation du pouvoir pontifical de St Pierre (Act. 1 : 15), la pratique communautaire du culte (Act.1 :14), la prédication publique missionnaire (Act.2 : 14-36 & Act.3 :12-19) la pratique de la pénitence et des sacrements de Baptême et Confirmation (Act.1 :19 & 3 :38).
Dieu a encore voulu une Église visible en ses sacrements dont il a subordonné la validité, donc l’efficacité opérative, à la contribution de la matière visible (en sus de la forme constituée par la formule rituelle) afin de transmettre la grâce invisible en vue de la sanctification ; pas de Baptême sans eau, pas de confirmation sans chrême, pas d’Eucharistie sans pain ni vin, pas d’extrême onction sans huile sainte etc.… Certes Il aurait pu donner son efficacité au sacrement par la forme seule (les paroles du ministre sacré) ; il ne l’a pas voulu car c’est par le créé visible, sensible, qu’il veut nous faire accéder à la connaissance des réalités cachées, invisibles. Notre Dieu est un Dieu incarné en son Fils. Pourrait-il en être autrement de l’Église qui en est le Corps ?
Dieu n’a-t-il pas gravé dans la pierre la Loi naturelle des dix commandements ? Lui donnant forme visible.
Enfin, le cardinal a t il oublié les déclarations solennelles de l’Église elle-même sur soi ? :
Catéchisme de l’Église catholique de Jean Paul II :
771 " Le Christ, unique médiateur, constitue et continuellement soutient son Église sainte, communauté de foi, d’espérance et de charité, ici-bas, sur terre, comme un tout visible par lequel il répand, à l’intention de tous, la vérité et la grâce ". L’Église est à la fois :
" société dotée d’organes hiérarchiques et Corps Mystique du Christ ;
assemblée visible et communauté spirituelle ;
Église terrestre et Église parée de dons célestes ".
Et la Constitution Lumen Gentium de Vatican II chapitre 8:
« . Cette société organisée hiérarchiquement d’une part et le corps mystique d’autre part, l’ensemble discernable aux yeux et la communauté spirituelle, l’Église terrestre et l’Église enrichie des biens célestes ne doivent pas être considérées comme deux choses, elles constituent au contraire une seule réalité complexe, faite d’un double élément humain et divin
C’est là l’unique Église du Christ, dont nous professons dans le symbole l’unité, la sainteté, la catholicité et l’apostolicité [12], cette Église que notre Sauveur, après sa résurrection, remit à Pierre pour qu’il en soit le pasteur (Jn 21, 17), qu’il lui confia, à lui et aux autres Apôtres, pour la répandre et la diriger (cf. Mt 28, 18, etc.) et dont il a fait pour toujours la « colonne et le fondement de la vérité » (1 Tm 3, 15). Cette Église comme société constituée et organisée en ce monde, c’est dans l’Église catholique qu’elle subsiste, gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques qui sont en communion avec lui »
Déclaration « Dominus Iesus » 16 juin 2000 (Jean Paul II) :
le Royaume tel que l'entendent des formulations unilatérales , finit par marginaliser ou sous-estimer l'Église, par réaction à un “ecclésiocentrisme” supposé du passé et parce qu'elles ne considèrent l'Église elle-même que comme un signe, d'ailleurs non dépourvu d'ambiguïté ».Ces thèses sont contraires à la foi catholique parce qu'elles nient l'unicité de rapport du Christ et de l'Église avec le Royaume de Dieu.”


Que resterait-t-il de la mission et du rôle évangélisateur d’une Église invisible, impalpable33 ?
«Du pain, du riz, d’autres peuvent en donner à l’homme, mais  si l’Église ne donne pas la Parole de Dieu, qui la donnera » (Père Bruckberger).
L’Église invisible du Cardinal invisible est une invention déiste34 pour agnostique désabusé, une institution libre, vaporeuse et éthérée qui vous permet la libre pensée35.
Mais ce n’est pas l’Église de Jésus Christ.






Le principe de Poo :
Le Cardinal fait le récit de ses séjours en Thaïlande qu’il partagera quelque temps avec son interlocuteur écrivain en novembre 2005 (page 287 et suivantes). Dans une maison d’enfants malades le Cardinal assiste de longues heures l’un d’eux, nommé Poo, atteint du SIDA en stade terminal. Silencieux, communiquant peu avec le malade à cause de l’obstacle de la langue, il se borne à le veiller, être présent, faire quelques gestes simples de douceur (l’essuyer, presser sa main, le regarder) (page 308). Attitude pleine de charité personnelle forte, poignante, généreuse. C’est la face lumineuse et pleine d’abnégation du Cardinal dont il va dégager une théorie irrecevable. Décidément l’homme est souvent bienfaisant en sa pratique et bien hasardeux en ses opinions. C’est toute l’ambiguïté redoutablement séduisante, déroutante mais funeste de la personnalité qui fait, ici, le bien, et enseigne, là, l’équivoque. De la sorte il brouille toutes les pistes sur sa foi.
« -Apprenez-vous le catéchisme aux enfants malades du centre qui vous font la fête quand vous sortez dans la cour… ? Le Cardinal : - Bien sûr ! Vous l’avez constaté vous-même. Je leur fais ce catéchisme quand je m’occupe d’eux, quand je les aide à prendre leur médicament, quand je leur apprends un peu d’anglais ! Je ne leur fais pas un catéchisme de questions et de réponses, j’essaie de leur faire découvrir ce que c’est d’être aimé et d’aimer. » (Page 314).
Fort bien ! Mais si « la foi qui n’agit pas est-ce une foi sincère ? »36 « la charité sans enseigner, évangéliser, est-ce une charité entière ? ». Car St Paul nous dit que « la charité trouve sa joie dans la vérité » (1 Corinthiens 13,6) et nous savons que la première Charité qui est d’aimer Dieu est donc de lui obéir dans son exhortation « allez, enseignez toutes les nations… ».
Le bien qu’il fait par sa présence muette est certain, le bien qu’il ferait par son témoignage de Jésus Christ s’ajoutant à sa bienfaisance serait parfait. Car l’un procure la compassion mais l’autre procure le SALUT. Certes il cite l’obstacle de la langue mais il n’en fait pas la raison de son comportement. Car celui-ci est plus radical, doctrinal : l’évangélisation et la présence muette sont équivalents. Il nous répète là sous une autre forme son credo : l’humanité c’est l’évangile, humaniser c’est évangéliser.
Au fond, le Cardinal accomplit une mission d’ONG, non d’Église et sa vertu est la philanthropie, l’altruisme, non la Charité, vertu surnaturelle37:
Catéchisme de l’Église Catholique : « 1822. La charité est la vertu théologale par laquelle nous aimons Dieu par-dessus toute chose pour Lui-même, et notre prochain comme nous-mêmes pour l’amour de Dieu.
1824. Fruit de l’Esprit et plénitude de la loi, la charité garde les commandements de Dieu et de son Christ : " Demeurez en mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez en mon amour " (Jean 15, 9-10 ; cf. Matthieu 22, 40 ; Romains 13, 8-10).
Quant à sa saillie déplaisante sur le jeu de « questions/réponses» où le catéchisme serait réduit à un échange trivial de vulgaire ping-pong obtus, elle participe à sa stratégie de vocabulaire dépréciatif destiné à déconsidérer tout ce qui est doctrinal, tradition, enseignement structuré et hiérarchie dans l’Église. Décidément rien n’échappe dans ce domaine au ricanement grinçant du prélat.
Mais au fait, son livre, n’est il pas AUSSI qu’« un catéchisme de questions et de réponses » ?
Quand on triche avec la vérité, la vérité vous guette en embuscade.
« Retrouver » l’Évangile :
Dernière étape et but du Cardinal.
En « inventant d’autres manières de nous comporter » (page 385). Dans ce propos plein de présomption nous retrouvons encore les grands prétendus réformateurs qui, enjambant des dizaines de siècles d’Église, remontant anachroniquement le cours du temps, comme on pourrait remonter un fleuve, réinventent une nouvelle manière de vivre l’Évangile (étant d’ailleurs dépourvus de volonté et de désir de le répandre !). L’Évangélisme fut toujours une utopie – meurtrière de surcroît (comme le montre l’histoire des Réformateurs Luther, Calvin, Henri VIII ; lire aussi « le roi des derniers jours » Barret /Gurgand Hachette1981 et « le phénomène socialiste » Igor Chafarévitch Seuil 1977). L’évangélisme fut toujours une insurrection contre le catholicisme puisqu’il présume qu’Évangile et Église ont divergé et sont désormais en état de divorce irrémédiable. C’est donc à la fois, une désespérance et une incrédulité contraire à la foi. Celle ci nous rappelle la promesse irrémissible du Sauveur : «Je suis avec vous TOUS LES JOURS jusqu’à la fin du monde » (Matthieu 28 :2) et « j’ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille pas » (Luc 22 :32). Une promesse et une prière, divines, donc précieuses et opérantes.
Comme si 2000 ans d’Église avaient servi à enfouir l’Évangile à vivre et à prêcher sous les tapis du Vatican ! Et comme si un homme, fût-ce un Cardinal ou un groupe occulte38, étaient qualifiés, envoyés (par qui ?)39, mandatés, pour « restaurer » l’Évangile perdu, ou trahi, ou enseveli.
La doctrine de l’Évangélisme est plus encore qu’une faute contre le bon sens catholique une erreur historique de la raison elle-même. Car ce n’est pas l’Évangile qui a engendré l’Église, c’est l’Église qui nous a donné l’Évangile. Bornons nous à citer cette démonstration brève mais apodictique de Guillaume Estius40 dans son Enchiridion : « le Christ n’a écrit aucun livre ; il n’a pas davantage ordonné à ses disciples ou à ses apôtres d’en écrire ; l’Église est plus ancienne que l’Écriture. Quand les Apôtres commencèrent de prêcher, il n’y avait pas d’Évangile écrit, aucune épître de St Paul ; et cependant l’Église existait, fondée par le sang du Christ ».
C’est pourquoi St Augustin écrivait : « Nous ne voyons pas encore le Christ, mais nous voyons l’Église : croyons donc au Christ. Les Apôtres, au contraire, voyaient le Christ, mais ils ne voyaient pas l’Église si ce n’est par la foi. Ils virent une chose, ils en crurent une autre : faisons de même. Croyons au Christ, que nous ne voyons pas encore ; et en restant unis à l’Église que nous voyons, nous parviendrons enfin à voir celui que nous ne pouvons pas encore voir. » St Augustin (sermon 238).


La Tradition :
« Je vous rappelle, frères, l'Evangile que je vous ai prêché, que vous avez reçu, dans lequel vous demeurez fermes, et par lequel vous serez sauvés, si vous le retenez tel que je vous l'ai prêché: à moins que vous n'ayez cru en vain. Car je vous ai transmis en premier lieu ce que j'ai moi-même reçu. » (I Cor 15,1-3).


On comprend que la méconnaissance ou l’erreur sur les relations intimes, consubstantielles, entre Église et Évangile ait engagé le Cardinal vers un jugement si injuste et si irrecevable sur la nature de la Tradition dans laquelle il ne voit que « entassement…décisions entassées à travers le temps les unes sur les autres, toutes gardant le même caractère de certitude ». (Page 121).
Or tout est faux dans cette vision de la Tradition :
  1. Un « tas » est une accumulation de choses de même nature avec ou sans ordre. Au demeurant le mot entassement résonne péjorativement et l’est bien selon la définition « accumulation excessive et désordonnée »41 ; manifestement le cardinal veut discréditer le mot (pour mieux noircir la chose ?).
  2. La tradition n’accumule pas les décisions « les unes sur les autres », elle les hiérarchise, les ordonne selon leur matière, leur degré de crédibilité et de véracité, leur harmonie avec la Révélation, leur correspondance avec les besoins missionnaires de l’Église.
  3. Les degrés de certitude ne sont ni équivalents ni homogènes et l’Église sait là encore hiérarchiser les données du révélé transmis par la Tradition puisque 1) elle reconnait celle-ci comme source authentique du Révélé42 et 2) le Magistère de l’Église nous en donne le sens et la compréhension irréfutables puisque inspiré.
La tradition nous a transmis la loi, la discipline, ou plutôt la constitution chrétienne et les Écritures. Toutes ces choses, sorties de la même source et comme du même moule, reproduisent le même corps de doctrine et de société : elles se donnent un appui mutuel et demeurent inséparables. Il y a seulement cette différence pour les saintes Écritures, qu'elles sont venues les dernières, lorsque l'Église marchait déjà dans les premiers temps des Apôtres; qu'elles sont venues comme par occasion, successivement, et que grand nombre d'églises ont encore marché plus ou moins longtemps, sans les posséder que par parties, et même en étant tout à fait privées, comme saint Irénée le rapporte de nations barbares qui étaient chrétiennes et ne possédaient aucune Écriture. Ainsi les Écritures, nécessaires pour donner du corps et quelque chose d'immuable à l'enseignement oral pour la durée des siècles, ne le sont pas absolument pour la foi; tandis que la forme traditionnelle demeure dès l'origine comme la forme vivante et essentielle de l'Église et de tous ses enseignements.
Tel est aussi l’enseignement du Bienheureux Cardinal Newman : « Le texte sacré des Écritures ne fut jamais destiné à enseigner la doctrine, mais seulement à la prouver ; pour connaître celle-ci, il faut recourir aux formulaires de l’Église, par exemple au catéchisme ou aux symboles ». C’est le démenti de ce que le Cardinal commente sur la nécessité du catéchisme dont il dénigre la valeur et le sens.
La Sainte Tradition c’est la Transmission intacte et sacrée de la doctrine du Fondateur, non un « entassement » cumulatif de Bulles et de paperasses doctrinales ; le Cardinal en a une vue d’archiviste de préfecture, les saints y voyaient l’horizon qui s’offrait à des nains43 juchés sur des épaules de géants44 (l’image est de St Bernard).


La faction et l’anonymat :
« Celui qui me suit ne marche point dans les ténèbres »45 (Jean 8 :12)
Si nous avons suivi pas à pas le déroulement de la pensée cardinalice il sera manifeste que sa représentation du futur de l’Église est sombre et dévoyée. Ses analyses et projections exhalent un parfum délicieusement hétérodoxe, irrévérencieux et dissident. C’est son droit ; mais alors son devoir est de parler à visage découvert ; « Larvatus prodeo » (« je m’avance masqué ») devise de Descartes est une formule d’homme fort et plutôt métaphorique chez lui.46
Or ce courage, le Cardinal ne l’a pas. Pourquoi ? Il n’y a plus de bûchers, il n’y a plus d’Inquisition47 et les censures de l’Églises – rares et indulgentes- n’ont plus que très peu d’effets. Que craint-il ? Ou encore : qu’est-ce que cela cache ?
Bien qu’il fasse état à de nombreuses reprises de contacts, de groupes, d’affinités organisées quoique diffuses (page 371), « d’un certain nombre d’initiatives qui ont surgi ou vont surgir » (spontanément ?) (Page 372), « d’hommes et de femmes engagés dans des actions voisines (lesquelles ?), qui aiment se rencontrer » (page 372), «nous sommes un certain nombre à accepter de penser l’impensable48 » qui « proposent de nouveaux modèles d’être réellement chrétiens» (les modèles actuels ne le sont plus ?) et dont « nous savons, je le répète, que le temps travaille pour nous » (page 410) il réfute le possible soupçon de COMPLOT qui émerge naturellement à la lecture successive des caractéristiques du groupe dépeint. Mais ces dénégations ne convainquent pas car elles ne lèvent jamais le voile de son identité à lui ni des buts réels concrets poursuivi par ce parti dont les desseins sont sibyllins, mystérieux, énigmatiques et toujours discrets (voire secrets). Or notre Maître est venu dans la Lumière (Prologue de st Jean), il répliqua au Grand Prêtre « J'ai parlé ouvertement au monde; J'ai toujours enseigné dans la synagogue et dans le temple, où tous les Juifs s'assemblent, et Je n'ai rien dit en secret ». (Jean 18,20).Le secret cache souvent une action incertaine, douteuse ; l’Église a toujours argué –parmi les autres motifs doctrinaux- contre la Franc Maçonnerie, sa pratique du secret. Saint Paul nous met aussi en garde : « Ne prenez point part aux œuvres infructueuses des ténèbres, mais plutôt condamnez-les. Car ce qu'ils pratiquent en secret, on a honte même de le dire seulement. Mais tout ce qui est condamné est manifesté par la lumière; car tout ce qui est manifesté est lumière » (Ephésiens 5,11-13).
Monsieur le Cardinal, toute révérence gardée, votre anonymat ne me dit rien qui vaille. Ni le brouillard qui enveloppe votre ultime but.
On nous annonce un deuxième entretien qui s’intitulera « l’Esperance ». Dévoilerez vous votre identité, vos buts précis, votre doctrine, vos amis, les conséquences de vos choix ?
Pour l’honneur et la vérité de notre Mère l’Église moi aussi j’espère, j’espère un message moins déprimant, plus roboratif, plus exact, plus équilibré, plus respectueux de la Majesté et de la dignité de l’Église catholique car il n’y a pas lieu de rougir d’Elle.
« Si quelqu'un rougit de Moi et de Mes paroles au milieu de cette génération adultère et pécheresse, le Fils de l'homme rougira aussi de lui, lorsqu'Il viendra dans la gloire de Son Père, avec les Anges saints. » (Marc 8,38)
Jacques Camredon.




Un exemple d’humanisation :




Andres Serrano - Saint Andres des arts
06/05/1998 | 03H01
Du sang, de l'urine et du sperme : la galerie Yvon Lambert expose les Fluids d'Andres Serrano, liturgie sacrilège d'un observateur des hauts et bas de l'âme humaine.




De l'abstraction corporelle, Serrano glisse vite vers l'immersion de figures dans l'urine et c'est là que les ennuis commencent. Passe encore d'immerger le visage de Dante. Mais son Piss Christ (1987) heurte un tabou religieux qui fait hurler la droite et provoque une polémique d'une rare violence contre le système de subvention des arts plastiques aux Etats-Unis (le National Endowment for the Arts). Le TV-évangéliste Pat Robertson accuse le photographe de "gifler les valeurs que chérissent la plupart des Américains".
L'image de ce Christ en croix plongé dans l'urine auréolé d'un halo sacré et visqueux n'était pourtant "pas antichrétienne", explique Serrano. "L'idée était plus d'humaniser la figure du Christ. Mon but en fin de compte est de faire de beaux objets à partir de matériaux non orthodoxes. Mais j'étais un peu naïf. Je ne m'attendais pas à de telles réactions. J'ai été surpris par la haine que ça a suscité. A l'époque, je ne pensais pas que quelqu'un verrait ces images, encore moins qu'elles seraient vendues." Dix ans plus tard, la photo fait de nouveau scandale en Australie. Une rétrospective Serrano ferme l'année dernière au bout de quelques jours, quand un visiteur enragé par la photo la détruit. Protestations des autorités religieuses, manifestation anti-Serrano dans les rues de Melbourne et panique du directeur du musée qui interrompt l'exposition... Commentaire du photographe : "Je ne me suis jamais senti aussi célèbre." Ironie un brin amère qui correspond à la distance clinique qu'il entretient avec ses sujets.










1 Le Cardinal n’a pas souhaité que son identité soit révélée. Il a d’ailleurs une relation très débilitante avec la notion d’identité, particulièrement celle de l’Église. Je dirai plus loin de quoi cet anonymat est le signe.
2 Déjà en 1963 il y a un demi siècle, un protestant, professeur d’Université à Bordeaux, Jacques Ellul écrivit – en plein Concile- un livre intitulé « Fausse présence au monde moderne » (Édition : Tribune libre protestante). On ferait bien de le relire.
3 Anachronique car on s’entête à juger les siècles antérieurs avec nos critères actuels et l’on commet donc une injustice et une torsion de perspective. Sommes-nous indemnes d’erreurs et de crimes pour juger nos ancêtres et surtout connaissons-nous parfaitement les ressorts, les arcanes, les circonstances et les motivations pour que notre jugement soit vraiment éclairé ? Que dira-t-on de nous dans deux siècles ?
4 Définition du dictionnaire CNTRL : Doctrine selon laquelle la connaissance historique permet d'expliquer la totalité ou certains aspects du devenir humain. (http://www.cnrtl.fr/definition/historicisme).
5 « La forme quasi définitive du Canon, à l’exception du Memento des défunts (qui apparaîtra à l’aube du VIIIe siècle) pourrait être datée de la fin du Ve siècle, puisque le missel manuscrit de Stowe daté du IXe siècle le nomme « le Canon du Seigneur, du pape Gélase » ».( La messe de saint Justin à saint Grégoire par Emmanuel de Butler, OSB dans La Nef n°108, janvier 2001). Le Père Amiot professeur à Saint Sulpice dans son livre savant « Histoire de la Messe » (1956 collection Je sais-Je crois Fayard) attribue lui cette prière du canon à l’époque du Pape Symmaque (†514) : les deux avis sont concordants puisque St Symmaque fut pape deux ans après la mort de St Gélase.
6 Jésus lui-même ne nous a-t-il pas dit « vous êtes dans le monde, mais vous n’êtes pas du monde » (St Jean 17 :14-18).
7 Il suffit de consulter la monumentale « Histoire de l’Église » de Fliche et Martin en 21 tomes ou celle de Rohrbacher en 15 tomes.
8 Doctrine opposée au nestorianisme mais aussi erronée que lui en sens inverse ; professée par Eutychès elle ne reconnaissait qu’une nature au Christ, la nature divine. Elle fut condamnée au concile de Chalcédoine en 451.
9 Patriarches et évêques emprisonnés, exilés, déchus abondent durant tout l’Empire romain après Constantin.
10 Doctrine inventée de fraîche date pour qualifier le prétendu statut triomphant et privilégié de l’Église dans la société après la conversion de l’empereur Constantin et son édit de Milan (313).
11 Le Pape Innocent XII refusera ces Quatre Articles, inacceptables pour l’Église. L’Église gallicane finira par reconnaitre son erreur. Mais les quatre articles préfiguraient la funeste Constitution civile du clergé de la révolution.
12 Pie VII se contenta alors de lui dire cette parole prophétique « votre bonheur est passé ».De ce jour Napoléon marcha de défaites en défaites.
13 Le développement sur Galilée qui suit doit beaucoup à l’excellent ouvrage « Croisades, inquisitions…Faut-il demander pardon ? » Éditions du MJCF. L’affaire Galilée y est développée avec beaucoup de détails. Sa lecture est indispensable à qui veut connaitre exactement le déroulement des faits et la VRAIE position de l’Église.
14 Le livre de Koestler, passionnant, est l’histoire des débuts de l’astronomie moderne à partir du XVI° siècle (Copernic, Galilée, Tycho Brahé, Kepler, Newton).
15 Cette indignité là fut en revanche celle du Sanhédrin qui condamna Jésus ; voici ce qu’en dit Saint Augustin : « Ils disaient entre eux les Romains viendront et détruiront notre ville. Ils craignirent de perdre leur puissance et ne pensèrent point à la vie éternelle, et ils perdirent ainsi l’une et l’autre. »
16 Il faut souligner, à l’encontre de la réputation « enfermée » faite à Pie IX, qu’il invita à participer au futur concile les évêques orientaux Orthodoxes, les « frères chrétiens séparés » Protestants et les Anglicans. Excepté des anglicans TOUS les autres refusèrent, raillèrent ou gardèrent le silence. L’œcuménisme ne date pas de Vatican II.
17 Il prétend que « vingt pour cent des 700 évêques présents quitta l’assemblée » soit 140 évêques. Page 234/235.
18 « Histoire générale de l’Église » (chapitre XIII tome VIII Bloud et Gay 1919) par Fernand Mourret professeur d’histoire au séminaire St Sulpice. Fliche et Martin dans le tome 21 de leur « Histoire de l’Église » consacré au règne de Bhx Pie IX donnent pour la pétition des évêques en faveur de l’infaillibilité 380 signatures sur la pétition collective et 100 individuelles soit 480 pétitionnaires. Pour le vote final et les évêques qui quittèrent le concile, les chiffres sont identiques : 535 Oui & 2 Non et 55 départs.
19 L’infaillibilité ne fut « utilisée » qu’une fois par Le Vénérable Pie XII pour proclamer le dogme de l’Assomption en 1950.


20 Lamennais devait quitter l’Église et terminer sa vie dans l’impénitence. Déjà le pape Léon XII qui l’avait reçu à Rome quelques années plus tôt l’avait jugé « halluciné » bien que fortement ultramontain alors. Le Pape avait prédit son apostasie.
21 Mais Grégoire XVI qualifié par les ennemis de l’Église de « réactionnaire » condamna aussi l’esclavage, toujours en vigueur encore, par sa Lettre apostolique In Supremo du 2 décembre 1839 : «: « [...] il arriva enfin que, depuis plusieurs siècles, il ne se trouvait plus d'esclaves dans la plupart des nations chrétiennes. Mais, nous le disons avec douleur, il y en eut depuis, parmi les fidèles même, qui, honteusement aveuglés par l'appât d'un gain sordide, ne craignirent point de réduire en servitude, dans des contrées lointaines, les Indiens, les nègres ou autres malheureux, ou bien de favoriser cet indigne attentat en établissant le commerce de ceux qui avaient été faits captifs par d'autres » Il condamnait aussi le principe qui était l’indigne justification de l’esclavage : l’inégalité des races. On se garde bien de rappeler cet acte du Pape Grégoire XVI.

22 In « L’Église en face de la Révolution » Crétineau- Joly.
23 « Sans le mystère du péché originel, le plus incompréhensible de tous, nous sommes incompréhensibles à nous-mêmes…L’homme est plus inconcevable sans ce mystère que ce mystère n’est inconcevable à l’homme. » Pascal


24 On entend souvent parler des « valeurs humaines » mais on ne les désigne jamais. C’est que l’on serait bien en peine de le faire car l’homme n’est pas créateur de « valeurs » il en est tout au plus le serviteur, l’usager. Que l’on parle d’amour, de bonté, de solidarité, de justice etc.… tout cela n’est que des vertus divines ou cardinales chrétiennes, bien trop souvent dégradées en simples valeurs . Les vertus chrétiennes de Charité, de Justice, de Force, de Tempérance jointes aux Béatitudes pureté, douceur, miséricorde, paix, allégresse sont des dons de Dieu qui humanisés sont dévalorisés et perdent leur force rayonnante.


25 Le Cardinal insiste fortement sur le fait que c’est l’encyclique Humanæ Vitæ qui a découragé et fait fuir les fidèles dans les années 1968 et suivantes et non les conséquences du Concile. Cette allégation, difficile à vérifier, est toutefois improbable puisque l’Encyclique de Paul VI ne faisait que répéter et confirmer une doctrine morale bien établie et solidement tenue par l’Église depuis toujours. L’Encyclique n’apportait donc pas une doctrine nouvelle susceptible de troubler les fidèles et de les déterminer à déguerpir de l’Église. Ils connaissaient cette position qui découle d’ailleurs de la Sainte Écriture elle-même. Le cardinal n’hésite jamais à forcer ainsi l’histoire ou les faits : de la même façon il avance que le concile « est l’autorité suprême dans l’Église » ce qui est une inexactitude condamnée par la bulle Execrabilis de Pie II de janvier 1460 et démentie par la Nota Prævia que Paul VI fit insérer dans la Constitution Lumen Gentium de Vatican II. L’autorité suprême et immédiate dans l’Église c’est le Souverain Pontife.
26 En particulier Pie XI dans la grande encyclique «Casti Connubii » 31 décembre 1930 et avant lui Léon XIII dans l’Encyclique Arcanum divinae sapientiae, 10 février 1880. Méditons -et rappelons au Cardinal X- les paroles solennelles de Pie XI dans son encyclique sur le sujet de l’usage illicite des moyens artificiels pour empêcher la vie : « Comme certains, s'écartant manifestement de la doctrine chrétienne telle qu'elle a été transmise depuis le commencement, et toujours fidèlement gardée, ont jugé bon récemment de prêcher d'une façon retentissante, sur ces pratiques, une autre doctrine, l'Église catholique, investie par Dieu même de la mission d'enseigner et de défendre l'intégrité des mœurs et l'honnêteté, l'Église catholique, debout au milieu de ces ruines morales, afin de garder la chasteté du lien nuptial à l'abri de cette honteuse déchéance, se montrant ainsi l'envoyée de Dieu, élève bien haut la voix par Notre bouche, et elle promulgue de nouveau : que tout usage du mariage, quel qu'il soit, dans l'exercice duquel l'acte est privé, par l'artifice des hommes, de sa puissance naturelle de procréer la vie, offense la loi de Dieu et la loi naturelle, et que ceux qui auront commis quelque chose de pareil se sont souillés d'une faute grave. Devoir des confesseurs et des prêtres qui ont charge d'âmes. C'est pourquoi, en vertu de Notre suprême autorité et de la charge que Nous avons de toutes les âmes, Nous avertissons les prêtres qui sont attachés au ministère de la confession et tous ceux qui ont charge d'âmes, de ne point laisser dans l'erreur touchant cette très grave loi de Dieu les fidèles qui leur sont confiés, et bien plus encore de se prémunir eux-mêmes contre les fausses opinions de ce genre, et de ne pactiser en aucune façon avec elles. Si d'ailleurs un confesseur, ou un pasteur des âmes — ce qu'à Dieu ne plaise — induisait en ces erreurs les fidèles qui lui sont confiés, ou si du moins, soit par une approbation, soit par un silence calculé, il les y confirmait, qu'il sache qu'il aura à rendre à Dieu, le Juge suprême, un compte sévère de sa prévarication ; qu'il considère comme lui étant adressées ces paroles du Christ : « Ce sont des aveugles, et ils sont les chefs des aveugles ; or, si un aveugle conduit un aveugle, ils tombent tous deux dans la fosse. » Ces paroles sont terribles parce que le sujet est la VIE. C’est donc une terrible responsabilité que prend la Cardinal en s’opposant résolument à cet enseignement moral (donc pleinement dans l’aire de l’assistance divine à l’Église) immuable et renouvelé.
27 Daniel 5 : 24-25 : C’est pourquoi Il a envoyé l'extrémité de cette main, qui a écrit ce qui est marqué sur la muraille. Or voici l'écriture qui a été tracée: Mané, Thécel, Pharès. (Compté, pesé, divisé).
28 « Ancien » qui vient de l’Ancien Testament est traduit en grec du Nouveau Testament par « presbytre » qui donnera « prêtre ».
29 Il était devenu aveugle sur le chemin de Damas lors de la manifestation de Jésus.
30 Père de Dreux ofm († 1671) in « Méditations ascétiques ».
31 Ainsi l’hérésie Donatiste des IV° & V° siècles prétendait que les sacrements opérés par les ministres indignes étaient invalides. A ce compte seule une Église constituée de saints était concevable ; mais le Seigneur, bon connaisseur de la nature humaine pour l’avoir créée et aussi pour les raisons susdites ne le voulait pas ainsi. Le Donatisme fut combattu par St Augustin et terrassé à la conférence de Carthage (juin 411). Luther qui accusait la hiérarchie catholique et le Pape de toutes les infamies, en étant d’ailleurs très éloigné lui-même d’une vie exemplaire, ressuscita le Donatisme. Le Cardinal X, dans ses exigences et ses jugements historiques erronés s’approche des arguments donatistes.
32 On sait ce que cela a donné en peu de temps : la dispersion anarchique des croyances Réformées aussi contradictoires entre elles qu’incompatibles avec une seule Confession. Lettre de Luther aux chrétiens d’Anvers en 1525 : « Le diable est parmi nous : il m’envoie chaque jour des visiteurs qui viennent frapper à ma porte : l’un ne veut pas du baptême, un autre rejette le sacrement eucharistique, un troisième annonce qu’un monde nouveau sera créé de Dieu avant le jugement dernier, un autre que le Christ n’est pas Dieu, un autre ceci, un autre cela. Il y a presque autant de croyances que de têtes.- Il n’est pas de butor qui, s’il rêve, ne se croie illuminé de Dieu ou prophète au moins » Voilà le résultat inexorable et prévisible d’une Église INVISIBLE.
33 Quand Jésus donna la preuve de sa résurrection aux Apôtres réunis, les traductions du grec lui font dire «Touchez moi et constatez, car un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez que j’en ai » (St Luc 24 :39). Mais le grec dit en réalité pselafaó «palpez moi ou tâtez moi » qui permet de vérifier une réalité matérielle incontestable. Dans sa première épître St Jean usera du même mot évocateur et fort « ce que nos mains ont palpé, du Verbe de vie… » epseláfesan (1 Jean 1 :1et s.). (« Ils disent « il est ressuscité » Vittorio Messori Edition FX de Guibert page 98-2004).
34 Le déisme c’est l’athéisme masqué des hésitants ou des timides. Je ne prétends pas que le Cardinal soit déiste, mais sa conception de l’Église correspond bien à celle d’un Dieu sans nature définie, sans essence et où chacun peut projeter ce qu’il en ressent.
35 Montaigne disait : « les opinions les plus éthérées voisinent souvent avec les mœurs les plus ténébreuses »
36 Racine, « Athalie ».
37 Cela n’est pas une faute bien sûr, mais c’est une imperfection pour un haut prélat catholique.
38 « Nous sommes un certain nombre de personnes un peu partout dans le monde qui avons appris à nous connaître… ». Nous « connaître » ou nous « reconnaître » ?


39 Écoutons Saint François de Sales : « Tout est assuré en l'obéissance, tout est suspect hors de l'obéissance.
Quand Dieu jette des inspirations dans un cœur, la première qu'il répand est celle de l'obéissance. Mais y eut-il jamais une plus illustre et sensible inspiration que celle qui fut donnée au glorieux saint Paul ? Or, le plus important de cette inspiration fut qu'il allât en la cité, en laquelle il apprendrait par la bouche d'Ananias, ce qu'il avait à faire ; et cet Ananias, homme grandement célèbre, était évêque de Damas. Quiconque dit qu'il est inspiré et refuse d'obéir aux supérieurs et suivre leur avis, il est un imposteur. Tous les prophètes et prédicateurs qui ont été inspirés de Dieu, ont toujours aimé l'Église, toujours adhéré à sa doctrine, toujours aussi été approuvés par elle, et n'ont jamais rien annoncé si fortement que cette vérité...
De sortes que les missions extraordinaires sont des illusions diaboliques, et non des inspirations célestes, si elles ne sont reconnues et approuvées par les pasteurs qui ont une mission ordinaire ». (VIII, 13).


40 Né à Gorcum Pays Bas en 1541. Docteur en théologie le 22 novembre 1580. Il mourut à Douai, en odeur de sainteté, le 20 septembre 1613. Ses admirables travaux sur les saintes Ecritures, ainsi que sur les quatre livres des Sentences de Pierre Lombard et sur la Somme théologique de saint Thomas d'Aquin, placent Estius au premier rang des maîtres de la science. Guillaume Estius était le neveu de l'un des principaux martyrs de Gorcum. Les dix-neuf martyrs de Gorkum, canonisés le 29 juin 1867 par Pie IX, appartiennent au martyrologe des Pays-Bas pendant les guerres de religion.
41 Dictionnaire CNTRL.
42 Constitution Dogmatique Dei Verbum de Vatican II : « 9. Le rapport réciproque entre la Tradition et l’Écriture : La sainte Tradition et la Sainte Écriture sont donc reliées et communiquent étroitement entre elles. Car toutes deux, jaillissant de la même source divine, ne forment pour ainsi dire qu’un tout et tendent à une même fin. En effet, la Sainte Écriture est la Parole de Dieu en tant que, sous l’inspiration de l’Esprit divin, elle est consignée par écrit ; quant à la sainte Tradition, elle porte la Parole de Dieu, confiée par le Christ Seigneur et par l’Esprit Saint aux Apôtres, et la transmet intégralement à leurs successeurs, pour que, illuminés par l’Esprit de vérité, en la prêchant, ils la gardent, l’exposent et la répandent avec fidélité : il en résulte que l’Église ne tire pas de la seule Écriture Sainte sa certitude sur tous les points de la Révélation. C’est pourquoi l’une et l’autre doivent être reçues et vénérées avec un égal sentiment d’amour et de respect ».
43 Nous mêmes
44 Les Pères de l’Église et leurs saints successeurs.
45 Cette citation de l’Évangile de St Jean est aussi le commencement de « L’Imitation de Jésus Christ ».
46 Bien que tout à fait appropriée puisque la philosophie du « cogito » engendra un cortège de philosophes idéalistes (au sens philosophique de négateurs du réel) qui ruina pour des siècles le sens commun et le rapport de l’intelligence au monde concret.
47 Dont les conséquences ne sont pas ce que les livres d’école alarmistes nous en disent et qui eurent aussi leur utilité en préservant entre autre la cohésion sociale (comme on dit de nos jours).
48 Parole redoutable mais qui demeure inexpliquée, scellée dans son imprécision. Ce qui la rend d’autant plus inquiétante, dérangeante et même menaçante.